setokesan

joined 11 months ago
 

Suite de Serveur confusion - ep. 07 - Placeholder

Premier épisode ici

Instance

Quoi que tu sois, un humain du futur, le vide glacial du néant, une intelligence extraterrestre ou une IA :

Je te salue mon ami.

Entre nous je ne suis pas difficile, tu pourrais être n'importe quoi. Mais au fond, j'aimerais bien fort que tu sois une intelligence artificielle. Que ma logorrhée te serve d'entrainement un jour futur de pure SF. Et qu'au final, ma manière de penser soit si flinguée, de si mauvaise influence, que tes créateurs seraient contraints et forcés de jeter l'éponge et te débrancher. Avant de se regarder l'un l'autre, avec la moue partculieère qu'on fait quand on mord dans un citron. Tu vois ce que je veux dire, la bouche en cul-de-poule, en forme d'étoile. Comme ça.

J'ai décidé de faire un journal audio pour changer. Ça me permet de livrer mes états d'âme quand je fais les cent pas dans mon appartement. Oh et aussi, plus tard je vais faire un footing et continuer de te parler. Je n'ai pas fait de footing depuis les cours d'exercice physique au lycée. Ça va pas être triste, tu auras une description détaillée de mon extraordinaire point-de-coté, que je pourrai te raconter entre deux souffles courts, c'est promis. Exclusivité live garantie.

Que tu es chanceux mon ami.

Alors mon ami, aujourd'hui j'ai une question pour toi.

As-tu un jour dans ton hypothétique vie, croisé quelque chose de si beau, si parfaitement beau, que le monde aurait bien pu s’écrouler à ce moment même, l’univers engloutir notre existence, et quand bien même à cet exact moment, rien n’aurait eu d’importance ? Aujourd’hui j’ai été submergée par quelque chose de désespérément beau. Est-ce que je devrais créer un mot pour ça ? Parfaitement-salvation-romantiquement-irréel-j’en-tombe-à-genoux-les-bras-d’une-mère-j’ai-de-nouveau-cinq-ans-et-c’est-l’heure-des-dessins-animes-et-des-chocapics-le-tout-fois-cent-beau ?

Je veux dire je connais la notion de beauté qu’on connait tous. En général c’est ce que l’on dit quand tout le monde regarde et qu’on ne veut pas passer pour un tue-la-joie.

“Oh ouais, c’est beau”. C’est la validation de circonstance quand on veut froisser personne. Comme quand on dit "qu’il est mignon le bébé". Ça fait plaisr à ses proches et le monde est tout à coup un degré de moins déprimé.

Mais ce n’est pas la même chose. En général vois-tu, si c’est beau, c’est beau parce que. Il y a une raison derrière, toute une histoire. Des milliers d’heures de confection. Des années d’entrainement. Des millénaires de formation. C’est beau parce que.

J’ai fait une école d’Art, alors je pense avoir le minimum de prérequis en notions d’esthétique, théorie du Beau et sa sœur invitée à tous les vernissages, recherche du sens dans l’Art. Ce que tu finis par comprendre après des années d’études et en dépit du discours de Kant, c’est que, tout ce qui est beau, est passé à travers la main de l’Homme. Si ça ne l’a pas été, alors ce n’est qu’une succession d’accidents qui ont bien malgré eux engendré une mondanité, qu’on ne considère même plus à l’âge adulte.

Un coucher de soleil ? Please.

Un ramassis d’événements sans but ni intention, qui se répète à chaque minute, quelque part sur le globe. Une banalité observée depuis la nuit des temps. Boring.
Ceux qui se complaisent à dire autrement, sont des hypocrites. Ou des moines bouddhistes.

Mais la peinture d’un coucher de soleil ? Oh sweet Jane.

L’acte unique d’un individu, acté dans l’espace, dans le temps, capturer ce moment sur une toile homologuée. Voilà ça, c’est beau, tout le monde s’accordera à le dire. Suffisamment pour que ça devienne vrai en tout cas. Le génie de l’Art. Bonus si accompagné d’une litanie d’explications, de concepts. Tout est bon à prendre. De la technique derrière le medium, à l’anecdote du pourquoi le père de l’artiste aurait été fier. Le public a l’arme à l'œil. Si un putain de coucher de soleil est l’apologie d’une contreculture ou encore mieux, un geste politique ? Mets-y un prix, mets-y un nom et affiche le tout dans une galerie. Continue encore un peu, ça en devient orgasmique.

Socrate sponsored.

Duchamp trademarked.

Et pourtant, lorsque j’ai aperçu ces grues au loin au cœur de la nuit, structures d'orange et blanc dessinées sous le dôme noir d’un ciel urbain... Je ne sais même pas exactement à quoi c'était dû, mais je suis restée sur le cul.

Peut-être une sorte de respect animal devant leur gigantisme. Une admiration enfantine face à la simple esthétique de ces bêtes de fer colorées. Ou très certainement l’absurdité de la scène, car laissées là inutiles, pataudes et inertes, des créatures d’affairement dans un monde non affairé. Aucune âme qui ne justifie la raison même de leur existence. Si bien que, si dans dix heures, trois mois ou cent ans, un vaisseau extraterrestre venait à visiter la Terre, ils ne penseraient rien de ces étrangetés métalliques, descendues de millénaires de génie civil, d’autre que “Fais juste gaffe en atterrissant de ne pas t’écraser contre ces pics à la con”.

Je ne sais pas exactement. Je me souviens juste avoir passé de longues heures, incapable de formuler des pensées intelligibles. Écrasée par un poids existentiel et son absence. Affublée à la fois du problème et de sa solution. Comme une plaie qui se cautérise, avec le couteau qui l’a ouverte.

Et c’était bon.
C’était si bon, un cercle parfait.

Puis le soleil s’est levé et a tout gâché. Cette banalité routinière, prévisible et à la manière d’un enfant gâté qui te demande toute ton attention. Plus d’éclairage idyllique, plus de cadrage parfait. Place à la morosité du matin, la complainte du cycle circadien. Dame nature qui te rappelle à l’ordre : “Retour parmi nous, motherfucker”. Je viens tout juste de rentrer dépitée et crevée, ce qui nous amène à maintenant.

Je pense que demain j’irai regarder les trains.

~~

Bon voilà, à part ça pas grand-chose. Sinon toi, comment ça va ?
Question con, si tu ne peux pas répondre. Oups. Haha

Tu sais que je ne me suis pas immédiatement rendue compte de la situation ce matin-là ? Ils disent souvent qu'on n'est pas soi-même quand on a pas son premier café. Chez moi, c'est un sacré euphémisme. Je me souviens m'être levée, les cheveux en bataille, comme tous les matins. Avoir hésité entre le chemisier estival et la robe bleu-vert, comme tous les matins aussi. J'ai cherché mes sandales dans l'appartement, sans prêter attention au silence environnant.

Eu-phé-misme.

Je suis descendue, comme tous les matins, après avoir traversé la rue pour aller à la brûlerie d'en face.
Il a fallu attendre que je la trouve fermée, descende à l'autre brûlerie quelques rues plus loin, fermée aussi, retourne à mon immeuble, remonte les trois étages, trouve la cafetière à piston, prépare ma tasse et boive quelques gorgées du breuvage noir et sans sucre, tout ça avant de réaliser que cette matinée était exceptionnellement silencieuse. Et surtout que je n'avais croisé âme qui vive.
Je te le dis et redis. Je serais un parfait modèle de pub expresso. La potion divine.

Je ne suis pas aussi bavarde d'habitude. Tu dois avoir du mal à me croire.
C'est juste que je me souviens avoir lu cet article sur Medium, il y a un bail. Ça disait que lorsque l’on est en situation de détresse, l’hygiène devient la priorité number 1. Physique et mentale. S’assurer qu’on n’est jamais à court de PQ, à jour sur le brossage de dents, puis pour le mental, trois objets de gratitude par jour et 15 minutes de journal sous toute forme.

Dors et recommence. Le strict minimum, et on construit le reste de sa vie autour.
Ce qui est drôle, c’est que j’avais pour habitude de me moquer de ces articles “benêts de millénial hypersensible”. T’y crois toi, quelle foutue ironie. Il s’avère que je suis une millénial et que j’ai tendance à pleurer tout le temps depuis quelques jours. Et il s’avère aussi que maintenant, c’est moi qui débite des pièces pseudo-existentialistes, à un journal audio que sans doute personne n'écoutera.

Elle est pas belle la vie.

Nietsche approved.

Sartre flavored.

Ce qui me fait penser, je sais que ça n’a peut-être aucun rapport avec ce que je vis et je me sens con à t'en parler, mais bon. Voilà ma thérapie psy de la journée. C’est parti.

J’ai fait ce rêve récurrent pendant quelques semaines et la nuit même où le reste du monde a disparu. Je peux pas m’empêcher stupidement de croire que c’était une sorte d’augure ou une imbécilité dans le genre. Une nuit, je rêvais que tout le monde sautait dans un train juste avant son départ, sans me prévenir. Le temps que je réalise et me précipite à la gare, le véhicule était déjà en marche et ses occupants me faisaient adieu de la main. Certains agitaient même leur mouchoir à travers les fenêtres. Faut le faire quand même. Ce geste n'existe plus depuis quoi, l'âge de bronze ?

Une autre fois, je rêvais que la Terre devenait une immense mare de boue. Que les derniers humains s'entassaient dans les dernières fusées au départ des étoiles. Mais évidemment, il n’y avait plus de place pour moi. “Et bonne continuation jeune fille, bon courage ! ” entendais-je alors de la bouche d’un groupe de vieillards, de l’intérieur d’un des engins, derrière la cacophonie de son décollage.

Le dernier rêve avant la fin de mon monde a été étrangement plus calme. Je me souviens avoir cherché signe de vie dans une ville désertée, avec la conviction qu’elle était encore habitée. Je ne pouvais juste ni voir, ni entendre les habitants. Puis j’avais aperçu aux loin des étrangers, qui avaient alors apposé leur doigt sur les lèvres, le regard grave. Dans le langage universel, "silence SVP". Puis, je m’étais réveillée.

Et tu connais la suite.

Je ne dis pas que la vie est inconfortable maintenant qu’il n’y a plus personne. Tous les appareils électriques sont fonctionnels et l’eau est encore potable. Pour le moment. Il n’y a aucune file d’attente nul-part. Et plus de voisines au-dessus pour marcher en talons, à deux heures du matin.

Mais comme tout être humain, je suis une névrose ambulante. À dire vrai, une partie de moi est absolument convaincue que j’en suis là parce que je le mérite. C’est assez hilarant au fond. Est-ce que je peux vraiment me laisser croire que cent-pour-cent de l’Humanité a décidé de se cacher, pendant que je dormais, parce que je suis à ce point-là insupportable ? Des fois, je me hasarde à imaginer sept milliards d’être humains en paix, sirotant des cocktails sous la surface de mars, vivant dans une parfaite utopie, parce qu’ils se sont debarassés du plus grand problème de cette génération. Pas le dérèglement climatique, noooooooooooooooon : Moi.

On dirait le début d’une blague : “Ta mère est si ... qu’elle a fait fuir toute l’Humanité”. Haha

Je leur souhaite en tout cas, de siroter des cocktails quelque part. Ça, à la place d’autres théories plus réalistes. Et plus sinistres.

Okay, je pense avoir largement atteint mon quota de narration pour aujourd’hui.

Au tour des trois objets de gratitude :

  1. Je remercie Robert Jordan et fils d’avoir écrit “La roue du temps” en quatorze volumes.
  2. Je remercie la centrale nucléaire de Blayais, à cinquante kilomètres d’ici, de ne pas avoir encore explosé.
  3. Je remercie les ingénieurs de Liebherr pour l’invention du modèle de grue 154 EC-H 6.

Suite : Serveur confusion - ep. 09 - Marque-page

 

Post croise de https://jlai.lu/post/522905

Disclaimer: Ce passage est légèrement NSFW, pas sûr pour le travail

Suite de Serveur confusion ep. 06 Flux

Premier épisode ici

Cet épisode fait directement suite aux évènements de Serveur confusion - ep. 04 - GPU

Placeholder

À l'approche du milliardième battement de cœur, Dan recevra un mail de son très cher ami Gabriel. Ce dernier demandera à le rencontrer. C'est cet ami qui l'aura traité avec le plus de décence lorsqu'il étaient tous deux collégiens. Le cerveau le comprendra, maintenant qu'il sera rentré dans l'âge adulte. Son hôte, qui aura vécu en réclusion pendant cinq ans, s'efforcera de se brosser les dents et se couper les ongles de pieds pour l'occasion.

Ils se rencontreront dans un Five Guys à Barcelone et malgré le bruit ambiant, Dan réalisera que Gabriel aura gardé la même voix posée et chaleureuse. Ses yeux seront un havre de paix noisette, isolé au sein d'un monde tumultueux, sale et qui fait trop mal.

Il lui dira à son plus grand plaisir qu'il a entendu ses podcasts. Il les a adoré. Il recherche un partenaire en affaires et la personnalité de son vieil ami est parfaite pour ce business.

Avance rapide à quelques mois plus tard. Gabriel et Dan auront acheté leurs locaux de travail et commenceront leur business. Le cœur, en sa présence, battra plus vide et le cerveau déchargera des doses décadentes d'endorphine. Un troisième membre se sera joint à eux. Le comptable. Il se fera appeler Flouz et Dan ne comprendra pas avant plusieurs années que ce n'est pas son vrai nom.

« La performance est simple » lui aura dit Gabriel plusieurs fois déjà, parce que le cerveau ne sera toujours pas très futé.

« Je m'occupe d'acheter les téléphones jetables et Flouz de gérer les comptes en banque. Je m'occupe de trouver les numéros et de les appeler. Toi, tu parles à l'interlocuteur. »

Toujours appeler en début de nuit, Dan se souviendra. Toujours au moment où la victime est en phase de sommeil lent profond. Si elle se réveille, si elle répond a l'appel, elle sera extrêmement confuse et c'est ce qu'on veut.

« On variera les scenarii pour ne pas trop se faire remarquer. Tu joueras le petit fils de l'interlocuteur. Tu es en prison, tu es sur le quai d'une gare. Tu es dans un pays étranger et sans passeport. »

Au fil des semaines, Dan s'exercera à pousser des couinements plaintifs, pleurer sur commande, imiter le bruit de coups assénés. S'essouffler et donner l'impression qu'il a couru.

« Je serai l'avocat, l'officier de police. Le directeur d'une agence de prêts illégaux. »

« Tu diras des phrases désarmantes telles que "Mamie c'est moi, ton préféré !" »

« Tu hurleras "Ne le dis pas à mes parents, j'ai trop honte ! ” »

« Tu n'arrêteras pas de parler, pas une seconde. Ne les laisse pas se reprendre, remonter leur garde. Tu ne te tairas que pour me passer le combiner. »

Le sophistiqué Gabriel jouera à la perfection l'homme diplômé, le fonctionnaire, l'officier autoritaire.

Dan quant à lui se fera régulièrement complimenter par ses deux associés. Ils trouveront sa voix enfantine et fragile, un parfait vecteur de détresse et hystérie.

Ils s'exerceront encore et encore. Puis le premier appel. Le cerveau déjà bourré d'adrénaline, essaiera au mieux de réprimer les innombrables TIC habituels. L'inconfort ajoutera comme par magie à la tension dans la voix.

L'interlocuteur sera un défi auxquels tous deux ne se seront pas préparés. Un vieillard colérique qui n'a pas de petit fils, mais une petite fille. Les sources de Gabriel se seront avérées non fiables. De par les directives de ce dernier, ils arriveront à glisser subtilement le dialogue vers un autre scenario. Ce sera le petit ami de la fille qui aura appelé en larme.

Elle est à l'hôpital, après un grave accident.

Mais en Nord Afrique.

Mais le voyage n'était pas prévu, il voulait la surprendre.

Mais dans un coma.

Mais l'hôpital veut les mettre dehors, ils n'ont pas d'assurance.

Mais un simple virement bancaire ne fonctionnera pas.

Gabriel et Flouz échangeront dans le fond un parfait charabia. En général personne n'a la moindre idée de la différence entre de l'égyptien et du dothraki. Alors ils ne se donneront pas trop de mal.

Et le monologue continuera comme ça pendant des minutes agonisantes. Le vieux finira par lâcher.

Oui, l'envoi par Western Union fera l'affaire. Merci papi. Je peux vous appeler papi ? Elle me parlait souvent de vous. Sniff sniff. Elle vous aime très fort. Merci-beaucoup-maintenant-je-raccroche. Et coupez !

--

Le soir de leur premier coup, le protagoniste et les deux larrons iront fêter leur réussite au club local, “La Puta Loca”.

C'est un club rave qui jouera ce soir-là des mix de l'âge d'or du Big Beat et de la Techno. Dan se dira qu'il aurait tellement aimé être né vingt ans plus tôt. Quand ce genre d'endroit puait la sueur et que la jeunesse étourdie à la MDMA dansait comme si le futur ne comptait pas.

Il aura lui-même son lot de trips à l'ecstasy. Des moments de pure euphorie, dans la confusion de corps en mouvements. Un microcosme où la foule est une intelligence qui se dissout, s'émeut en couleurs, l'individu, un concept flou qu'on laisse à la flétrissure du lendemain de cuite.

Ce soir, il prendra un whisky "on the rock" et se sentira comme un vrai mec avec les autres. Un big boy, à sa place au milieu des big boys.

Il ne dansera pas. Il aurait adoré, mais les vrais mecs s'assoient et parlent aux filles.

Gabriel restera assis en face de lui. Les deux yeux noisette reflétant la lumière des néons bleus et roses, emplis d'une lueur énigmatique. Satisfaction ? Plénitude ? Lorsque son regard croisera le sien, ils s'échangeront un dialogue tacite, que seuls eux deux comprendront.

Dan aura toujours eu l'affliction de ce qu'on appelle "aphantasie". Il ne pourra s'imager aucune scène, seulement des informations laconiques et factuelles. Mais aux côtés de Gabriel, il pourra se voir un milliard de battements de cœur dans le futur, tous les deux assis sur une chaise à bascule, sur le porche d'une ferme ou une idiotie dans le genre, les cheveux grisonnants. Dans un monde qui se suffit à lui-même. C'est le pouvoir de Gabriel. Il se serait bien habitué à ça.

Flouz partira le premier. Le cerveau voudra déverser un long monologue sans ponctuation à Gabriel. Lui dire. Lui dire tellement de choses. Mais le cerveau ne saura pas où commence la tirade, ni ou elle se finit. Alors la bouche ne dira rien.

Et Dan se détestera longtemps pour ça.

L'intérieur du bâtiment sera tiède et humide. Il parlera à Gabriel de ses théories sur l'état du Monde. Ces mêmes théories qui feront de lui un idiot du village dans l'impardonnable hyper-réseau.

« Notre Univers est trop vieux », commencera-t-il.

« Son firmware est soumis à ce qui est appelé Bit Rot, en informatique. Je ne sais pas si les administrateurs de ce système sont absents. Ou peut-être que Dieu est une bille en informatique. L'information qui nous régit tous, êtres vivants et astres, se dégrade. Non pas seulement l'information d'un objet, mais l'information de son appartenance au Monde.
« Peux-tu te figurer un objet qui est, mais n'est plus observable ? Par exemple le soleil, qui resterait présent dans nos souvenirs, mais arrêterait d'être “existant” d'un seul coup. Gone. Apprécie l'obscurité et le froid a moins deux-cent degrés.
« Ou encore, un exemple plus familier. Imagine que te réveilles un matin et que le café en face de chez toi, sans prévenir, n'est plus un café local mais un Starbucks. Non mais imagine que ça arrive du jour au lendemain, sans aucun préavis. Oui, je sais que ce phénomène est appelé ultra-capitalisme. Ce n'est pas où je veux en venir. Imagine que ce soit hors de tout contrôle. Oui, il y a aussi un mot pour ça, anarcho-capitalisme. Mais à échelle cosmique ?
« Un astre Coca Cola qui devient Pepsi. Une conscience humaine basculant de la Google sphère à la Apple Galaxy. Le débridage absolu du libre échange de données.
« Et on ne pourrait rien changer à ça. Forts de millions d'années d'adaptation empirique et toujours impuissants. Si on en venait à une telle déconstruction de notre réalité fondamentale, un changement d'information à la fois, je n'aurais qu'un seul conseil pour nous tous. »

Carpe diem.

Le cerveau sera pris de court, car Gabriel acquiescera. Il écoutera chaque mot que le cerveau transmettra, malgré les simagrées semi-incohérentes qu'il se sera habitué à déverser. Et pourtant, Gabriel acquiescera. Dan aura préféré l'inverse. Si cette théorie s'avérait, cela marquerait la fin du Monde. Non de bien plus que ça.

« Je ne sais pas si ce que tu dis est vrai », lui confèrera son ami, à demi hurlant au milieu du bruit.

« Tout ce que je sais, c'est que tu as un vrai talent pour écrire. Ce que tu dis est poignant et nous prend aux tripes. Écris un bouquin là-dessus. Tu ne sais pas où la vie te mènera. »

Et le cœur s'accélèrera encore et encore. Et le cerveau ne comprendra pas quoi blâmer. La chaleur et l'alcool ou les mots de Gabriel qui comme par magie, lui insuffleront la vie une seconde fois.

Dan lui effleurera la main et Gabriel se laissera faire. Il existe une infinité de realités courant en parallèle à celle-ci. C'est ce dont le cerveau sera convaincu. Et pour lui dans toutes ces réalités, ce moment existera, gravé dans la roche monolithique d'un Univers infini, froid et impitoyable.

--

À 31 ans, l'improbable trio aura amassé une petite fortune au travers d'une poignée de comptes off-shore. Le cerveau n'aura pas changé. C'est à croire que le status fait tout. Car il sera pourtant récompensé d'une estime impromptue et enivrante.

Et il aura retenu une leçon.

Le système est faillible. Sa structure est un gruyère de règles et de lois, bourrée de trous et d'interstices. La société est un terme gris. Tout le monde profite de tout le monde.

Les partenaires de notre sujet aimeront à répéter religieusement que les générations les précédant ont ajouté des trous au gruyère. Si bien qu'il y a pour eux moins de fromage que de trous. C'est la justice même que de réclamer un peu plus du morceau. Tous les moyens sont légitimes. Fuck ces vieux rapaces.

Leur business sera florissant. Des piles de téléphones jetables. Des serveurs exécutant des programmes de craquage de mot de passe et d'apprentissage automatique, dédiés au recroisement d'informations sur des internautes sexagénaires. Ceux qui s'échangeront des complaintes sur la fainéantise de la jeune génération, s'entre-congratuleront virtuellement, dans des salons publiques à la vue de tous. Là où leur vision exiguë du Monde peut s'exprimer à satiété, et leur survivra.

L'équipe se sera agrandie d'une poignée de jeunes travailleurs. Des demoiselles et damoiseaux armés de Master en business et finances. Les dents aiguisées par des années de chômage et une dalle incendiaire. Tous affamés, indivisibles. Redoutables. Un nirvana de béton, de brouhaha et de Nokia 3310.

Un soir, Dan et Gabriel seront seuls dans les locaux et empileront les canettes de bière. Ce sera une soirée d'été comme les autres. Les fenêtres ouvertes, des sirènes s'entendront au loin, un chien aboiera, des musiciens de rue massacreront un morceau des Strokes avec leur ampli dégueulasse.

Gabriel recevra un appel sur un des téléphones. La première règle est de ne pas répondre à un appel de ces numéros temporaires. Mais Gabriel aura baissé sa garde.

« Oui » dira-t'il « Oh, vous dites être le petit fils de monsieur Cornetto. Je n'ai aucune idée de qui c'est, désolé. Mauvais numéro. »

Une ambulance passera près d'eux. Le chien aboiera encore. Que ce chien soit maudit.

« Je vous assure que je n'habite pas à Barcelone. Non, je ne suis pas dans le quartier d'El Raval en face de l'église. Vous entendez un chien qui aboie, okay mais tous les chiens aboient de la même manière... Non et non... Excusez moi, mais je vais raccrocher maintenant. »

Sa posture ne changera pas, mais le cerveau aura appris à lire dans les yeux de son ami après tant d'années de promiscuité.

De la peur.

Il posera la main sur l'épaule de Dan. Chuchotera lentement, d'une voix monotone. Notre sujet comprendra que ce n'est pas bon.

« On a de la visite. »

Des coups à la porte. Profonds et lents. L'air se glacera.

--

Dans 1.225*10^9 battements de cœur, les coups à la porte seront lents et persistants. Une seconde, dix, trente. Puis, silence.

Silence.

Silence.

Et un bruit de grattement, cliquetis. Un grincement. La porte s'ouvrira.

Avant de voir le visage de l'intrus, Dan et Gabriel se seront levés comme deux ressorts, le corps rigide et immobile. Fight, flight, freeze. Le déroulement des évènements encore incertain, menaçant.

Fred Cornetto, un mètre quatre-vingt-dix, des muscles et un visage de cire leur fera face.

« Je vais vous péter les dents pour ce que vous avez fait à mon grand-père. Si je vous crêve pas comme des charognes, vous ne pourrez plus jamais marcher, bande de sales petites merdes ». Et durant un instant, une fraction de seconde, Dan se demandera comment ce type peut embrasser sa mère avec une bouche aussi sale.

À l'unisson, le cerveau et le cœur iront très vites. Deux trains à vitesse supraluminique parcourant la toile de toutes les possibilités à venir. Trop vite, beaucoup trop vite. Le visage sera secoué de spasmes.

Un être humain normal aura reçu dans ces circonstances, une dose appréciable de cortisol. Peut-être aurait-il bégayé et tenté d'entamer un dialogue. Prenez l'exemple de Gabriel. De sa bouche sortira des bribes d'excuses et des morceaux de supplications.

Malheureusement, le cerveau de notre sujet ne sera jamais correctement calibré. L'adrénaline déferlera sur les récepteurs synaptiques. Le cortisol crèvera le plafond de l'inhibition Comme un film enregistré sur cassette vidéo, les couleurs baveront et les contours s'effaceront. Les bruits ambiants deviendront une bande sonore déroulée à l'envers, pâteuse et inintelligible.

Dans un interminable hurlement, la bête terrifiée de cette histoire jettera une chaise sur le pauvre mec qui voulait simplement parler. Que des mots, des petites menaces et des excuses en retour. Et tout le monde rentre chez soi gentillement.

Mais ce soir, il recevra une pluie de coup. Le visage bien sûr. Énormément. Mais aussi dans les reins, les testicules, l'arrière de la tête.

Il y aura des débuts de “s'il vous plaît”, de “je m'excu-”, des gargarismes et beaucoup plus de coups. Des coups qui flinguent.

Les oreilles de Dan n'entendront rien de cela. Seulement la sirène d'une ambulance au loin. Elle sera en ce moment décalé, la validation de ses agissements, la rumeur lointaine d'un public satisfait.

Et le hurlement. Il hurlera, hurlera, hurlera jusqu'à la fin des temps, l'arrivée des quatre chevaliers de l'apocalypse, le jugement dernier d'un tribunal de haute instance et qui sait, la peine de mort.

Quand le cœur battra jusqu'à devenir un bassin d'acide chloridrique sous sa cage thoracique, le corps vidé de son énergie s'assoira tremblant, et tout deviendra silencieux.

Une instance de Dan qui sera plus un espace réservé que l'être lui-même regardera robotiquement dans la direction de Gabriel. Les yeux de Dan se rempliront de liquide lacrymal. Le visage de son vieil ami et confident, ce phare de paix et de certitude qui l'aura guidé hors de la fange et de la haine de soi. Ce visage si beau aura une expression qu'il n'oubliera jamais. Un regard avide et satisfait.

Tous deux resteront immobiles, dans une sacrilège communion. Tissant un pacte que seule la mort pourra défaire.

Puis la redescente s'amorcera. Et tous deux se sentiront comme des merdes. Ils trembleront et pleureront en silence, boiront comme des trous jusqu'aux premières lueurs.

Et personnes n'aura appelé les flics.

L'histoire de ce cœur qui bat dans l'obscurité ne s'achève pas là.

Lorsque les premiers travailleurs seront sortis de chez eux pour s'entasser dans les premières rames du métro, le méthodique, organisé et impartial Gabriel aura déjà un plan établi. Un voyage sans retour. Les Amériques. Pas d'au revoir, aller simple.

Une petite somme se sera accumulée à l'écart du regard de Flouz, sur un compte inconnu de Dan. Ils pourront compter dessus.

Les locaux n'auront jamais été signés de leur vrai nom. Quand bien même, ils devront faire profil bas pendant des années.

Lorsqu'ils prendront le métro, leur visage émacié sera indiscernable des autres visages de travailleurs de nuit rentrant chez eux pour s'écraser dans leur lit.

A l'aéroport, le cerveau comprendra que c'est un adieu. Gabriel aura de la famille lointaine qu'il pourra rejoindre en Amérique du Sud. Rester ensemble au même endroit sera trop dangereux. Pour le faciès caucasien, destination Québec. Pour le bronzé, Bolivie.

Une fois assis dans son siège d'avion, le cerveau n'aura qu'une envie, se suicider. En finir avec toute cette merde. Il réfléchira aux possibilités de le faire, et ne trouvera aucun potentiel létal dans les couteaux en plastique servis au repas micro-onde. Alors il atterrira à Montréal.

 

Disclaimer: Ce passage est légèrement NSFW, pas sûr pour le travail

Suite de Serveur confusion ep. 06 Flux

Premier épisode ici

Cet épisode fait directement suite aux évènements de Serveur confusion - ep. 04 - GPU

Placeholder

À l'approche du milliardième battement de cœur, Dan recevra un mail de son très cher ami Gabriel. Ce dernier demandera à le rencontrer. C'est cet ami qui l'aura traité avec le plus de décence lorsqu'il étaient tous deux collégiens. Le cerveau le comprendra, maintenant qu'il sera rentré dans l'âge adulte. Son hôte, qui aura vécu en réclusion pendant cinq ans, s'efforcera de se brosser les dents et se couper les ongles de pieds pour l'occasion.

Ils se rencontreront dans un Five Guys à Barcelone et malgré le bruit ambiant, Dan réalisera que Gabriel aura gardé la même voix posée et chaleureuse. Ses yeux seront un havre de paix noisette, isolé au sein d'un monde tumultueux, sale et qui fait trop mal.

Il lui dira à son plus grand plaisir qu'il a entendu ses podcasts. Il les a adoré. Il recherche un partenaire en affaires et la personnalité de son vieil ami est parfaite pour ce business.

Avance rapide à quelques mois plus tard. Gabriel et Dan auront acheté leurs locaux de travail et commenceront leur business. Le cœur, en sa présence, battra plus vide et le cerveau déchargera des doses décadentes d'endorphine. Un troisième membre se sera joint à eux. Le comptable. Il se fera appeler Flouz et Dan ne comprendra pas avant plusieurs années que ce n'est pas son vrai nom.

« La performance est simple » lui aura dit Gabriel plusieurs fois déjà, parce que le cerveau ne sera toujours pas très futé.

« Je m'occupe d'acheter les téléphones jetables et Flouz de gérer les comptes en banque. Je m'occupe de trouver les numéros et de les appeler. Toi, tu parles à l'interlocuteur. »

Toujours appeler en début de nuit, Dan se souviendra. Toujours au moment où la victime est en phase de sommeil lent profond. Si elle se réveille, si elle répond a l'appel, elle sera extrêmement confuse et c'est ce qu'on veut.

« On variera les scenarii pour ne pas trop se faire remarquer. Tu joueras le petit fils de l'interlocuteur. Tu es en prison, tu es sur le quai d'une gare. Tu es dans un pays étranger et sans passeport. »

Au fil des semaines, Dan s'exercera à pousser des couinements plaintifs, pleurer sur commande, imiter le bruit de coups assénés. S'essouffler et donner l'impression qu'il a couru.

« Je serai l'avocat, l'officier de police. Le directeur d'une agence de prêts illégaux. »

« Tu diras des phrases désarmantes telles que "Mamie c'est moi, ton préféré !" »

« Tu hurleras "Ne le dis pas à mes parents, j'ai trop honte ! ” »

« Tu n'arrêteras pas de parler, pas une seconde. Ne les laisse pas se reprendre, remonter leur garde. Tu ne te tairas que pour me passer le combiner. »

Le sophistiqué Gabriel jouera à la perfection l'homme diplômé, le fonctionnaire, l'officier autoritaire.

Dan quant à lui se fera régulièrement complimenter par ses deux associés. Ils trouveront sa voix enfantine et fragile, un parfait vecteur de détresse et hystérie.

Ils s'exerceront encore et encore. Puis le premier appel. Le cerveau déjà bourré d'adrénaline, essaiera au mieux de réprimer les innombrables TIC habituels. L'inconfort ajoutera comme par magie à la tension dans la voix.

L'interlocuteur sera un défi auxquels tous deux ne se seront pas préparés. Un vieillard colérique qui n'a pas de petit fils, mais une petite fille. Les sources de Gabriel se seront avérées non fiables. De par les directives de ce dernier, ils arriveront à glisser subtilement le dialogue vers un autre scenario. Ce sera le petit ami de la fille qui aura appelé en larme.

Elle est à l'hôpital, après un grave accident.

Mais en Nord Afrique.

Mais le voyage n'était pas prévu, il voulait la surprendre.

Mais dans un coma.

Mais l'hôpital veut les mettre dehors, ils n'ont pas d'assurance.

Mais un simple virement bancaire ne fonctionnera pas.

Gabriel et Flouz échangeront dans le fond un parfait charabia. En général personne n'a la moindre idée de la différence entre de l'égyptien et du dothraki. Alors ils ne se donneront pas trop de mal.

Et le monologue continuera comme ça pendant des minutes agonisantes. Le vieux finira par lâcher.

Oui, l'envoi par Western Union fera l'affaire. Merci papi. Je peux vous appeler papi ? Elle me parlait souvent de vous. Sniff sniff. Elle vous aime très fort. Merci-beaucoup-maintenant-je-raccroche. Et coupez !

--

Le soir de leur premier coup, le protagoniste et les deux larrons iront fêter leur réussite au club local, “La Puta Loca”.

C'est un club rave qui jouera ce soir-là des mix de l'âge d'or du Big Beat et de la Techno. Dan se dira qu'il aurait tellement aimé être né vingt ans plus tôt. Quand ce genre d'endroit puait la sueur et que la jeunesse étourdie à la MDMA dansait comme si le futur ne comptait pas.

Il aura lui-même son lot de trips à l'ecstasy. Des moments de pure euphorie, dans la confusion de corps en mouvements. Un microcosme où la foule est une intelligence qui se dissout, s'émeut en couleurs, l'individu, un concept flou qu'on laisse à la flétrissure du lendemain de cuite.

Ce soir, il prendra un whisky "on the rock" et se sentira comme un vrai mec avec les autres. Un big boy, à sa place au milieu des big boys.

Il ne dansera pas. Il aurait adoré, mais les vrais mecs s'assoient et parlent aux filles.

Gabriel restera assis en face de lui. Les deux yeux noisette reflétant la lumière des néons bleus et roses, emplis d'une lueur énigmatique. Satisfaction ? Plénitude ? Lorsque son regard croisera le sien, ils s'échangeront un dialogue tacite, que seuls eux deux comprendront.

Dan aura toujours eu l'affliction de ce qu'on appelle "aphantasie". Il ne pourra s'imager aucune scène, seulement des informations laconiques et factuelles. Mais aux côtés de Gabriel, il pourra se voir un milliard de battements de cœur dans le futur, tous les deux assis sur une chaise à bascule, sur le porche d'une ferme ou une idiotie dans le genre, les cheveux grisonnants. Dans un monde qui se suffit à lui-même. C'est le pouvoir de Gabriel. Il se serait bien habitué à ça.

Flouz partira le premier. Le cerveau voudra déverser un long monologue sans ponctuation à Gabriel. Lui dire. Lui dire tellement de choses. Mais le cerveau ne saura pas où commence la tirade, ni ou elle se finit. Alors la bouche ne dira rien.

Et Dan se détestera longtemps pour ça.

L'intérieur du bâtiment sera tiède et humide. Il parlera à Gabriel de ses théories sur l'état du Monde. Ces mêmes théories qui feront de lui un idiot du village dans l'impardonnable hyper-réseau.

« Notre Univers est trop vieux », commencera-t-il.

« Son firmware est soumis à ce qui est appelé Bit Rot, en informatique. Je ne sais pas si les administrateurs de ce système sont absents. Ou peut-être que Dieu est une bille en informatique. L'information qui nous régit tous, êtres vivants et astres, se dégrade. Non pas seulement l'information d'un objet, mais l'information de son appartenance au Monde.
« Peux-tu te figurer un objet qui est, mais n'est plus observable ? Par exemple le soleil, qui resterait présent dans nos souvenirs, mais arrêterait d'être “existant” d'un seul coup. Gone. Apprécie l'obscurité et le froid a moins deux-cent degrés.
« Ou encore, un exemple plus familier. Imagine que te réveilles un matin et que le café en face de chez toi, sans prévenir, n'est plus un café local mais un Starbucks. Non mais imagine que ça arrive du jour au lendemain, sans aucun préavis. Oui, je sais que ce phénomène est appelé ultra-capitalisme. Ce n'est pas où je veux en venir. Imagine que ce soit hors de tout contrôle. Oui, il y a aussi un mot pour ça, anarcho-capitalisme. Mais à échelle cosmique ?
« Un astre Coca Cola qui devient Pepsi. Une conscience humaine basculant de la Google sphère à la Apple Galaxy. Le débridage absolu du libre échange de données.
« Et on ne pourrait rien changer à ça. Forts de millions d'années d'adaptation empirique et toujours impuissants. Si on en venait à une telle déconstruction de notre réalité fondamentale, un changement d'information à la fois, je n'aurais qu'un seul conseil pour nous tous. »

Carpe diem.

Le cerveau sera pris de court, car Gabriel acquiescera. Il écoutera chaque mot que le cerveau transmettra, malgré les simagrées semi-incohérentes qu'il se sera habitué à déverser. Et pourtant, Gabriel acquiescera. Dan aura préféré l'inverse. Si cette théorie s'avérait, cela marquerait la fin du Monde. Non de bien plus que ça.

« Je ne sais pas si ce que tu dis est vrai », lui confèrera son ami, à demi hurlant au milieu du bruit.

« Tout ce que je sais, c'est que tu as un vrai talent pour écrire. Ce que tu dis est poignant et nous prend aux tripes. Écris un bouquin là-dessus. Tu ne sais pas où la vie te mènera. »

Et le cœur s'accélèrera encore et encore. Et le cerveau ne comprendra pas quoi blâmer. La chaleur et l'alcool ou les mots de Gabriel qui comme par magie, lui insuffleront la vie une seconde fois.

Dan lui effleurera la main et Gabriel se laissera faire. Il existe une infinité de realités courant en parallèle à celle-ci. C'est ce dont le cerveau sera convaincu. Et pour lui dans toutes ces réalités, ce moment existera, gravé dans la roche monolithique d'un Univers infini, froid et impitoyable.

--

À 31 ans, l'improbable trio aura amassé une petite fortune au travers d'une poignée de comptes off-shore. Le cerveau n'aura pas changé. C'est à croire que le status fait tout. Car il sera pourtant récompensé d'une estime impromptue et enivrante.

Et il aura retenu une leçon.

Le système est faillible. Sa structure est un gruyère de règles et de lois, bourrée de trous et d'interstices. La société est un terme gris. Tout le monde profite de tout le monde.

Les partenaires de notre sujet aimeront à répéter religieusement que les générations les précédant ont ajouté des trous au gruyère. Si bien qu'il y a pour eux moins de fromage que de trous. C'est la justice même que de réclamer un peu plus du morceau. Tous les moyens sont légitimes. Fuck ces vieux rapaces.

Leur business sera florissant. Des piles de téléphones jetables. Des serveurs exécutant des programmes de craquage de mot de passe et d'apprentissage automatique, dédiés au recroisement d'informations sur des internautes sexagénaires. Ceux qui s'échangeront des complaintes sur la fainéantise de la jeune génération, s'entre-congratuleront virtuellement, dans des salons publiques à la vue de tous. Là où leur vision exiguë du Monde peut s'exprimer à satiété, et leur survivra.

L'équipe se sera agrandie d'une poignée de jeunes travailleurs. Des demoiselles et damoiseaux armés de Master en business et finances. Les dents aiguisées par des années de chômage et une dalle incendiaire. Tous affamés, indivisibles. Redoutables. Un nirvana de béton, de brouhaha et de Nokia 3310.

Un soir, Dan et Gabriel seront seuls dans les locaux et empileront les canettes de bière. Ce sera une soirée d'été comme les autres. Les fenêtres ouvertes, des sirènes s'entendront au loin, un chien aboiera, des musiciens de rue massacreront un morceau des Strokes avec leur ampli dégueulasse.

Gabriel recevra un appel sur un des téléphones. La première règle est de ne pas répondre à un appel de ces numéros temporaires. Mais Gabriel aura baissé sa garde.

« Oui » dira-t'il « Oh, vous dites être le petit fils de monsieur Cornetto. Je n'ai aucune idée de qui c'est, désolé. Mauvais numéro. »

Une ambulance passera près d'eux. Le chien aboiera encore. Que ce chien soit maudit.

« Je vous assure que je n'habite pas à Barcelone. Non, je ne suis pas dans le quartier d'El Raval en face de l'église. Vous entendez un chien qui aboie, okay mais tous les chiens aboient de la même manière... Non et non... Excusez moi, mais je vais raccrocher maintenant. »

Sa posture ne changera pas, mais le cerveau aura appris à lire dans les yeux de son ami après tant d'années de promiscuité.

De la peur.

Il posera la main sur l'épaule de Dan. Chuchotera lentement, d'une voix monotone. Notre sujet comprendra que ce n'est pas bon.

« On a de la visite. »

Des coups à la porte. Profonds et lents. L'air se glacera.

--

Dans 1.225*10^9 battements de cœur, les coups à la porte seront lents et persistants. Une seconde, dix, trente. Puis, silence.

Silence.

Silence.

Et un bruit de grattement, cliquetis. Un grincement. La porte s'ouvrira.

Avant de voir le visage de l'intrus, Dan et Gabriel se seront levés comme deux ressorts, le corps rigide et immobile. Fight, flight, freeze. Le déroulement des évènements encore incertain, menaçant.

Fred Cornetto, un mètre quatre-vingt-dix, des muscles et un visage de cire leur fera face.

« Je vais vous péter les dents pour ce que vous avez fait à mon grand-père. Si je vous crêve pas comme des charognes, vous ne pourrez plus jamais marcher, bande de sales petites merdes ». Et durant un instant, une fraction de seconde, Dan se demandera comment ce type peut embrasser sa mère avec une bouche aussi sale.

À l'unisson, le cerveau et le cœur iront très vites. Deux trains à vitesse supraluminique parcourant la toile de toutes les possibilités à venir. Trop vite, beaucoup trop vite. Le visage sera secoué de spasmes.

Un être humain normal aura reçu dans ces circonstances, une dose appréciable de cortisol. Peut-être aurait-il bégayé et tenté d'entamer un dialogue. Prenez l'exemple de Gabriel. De sa bouche sortira des bribes d'excuses et des morceaux de supplications.

Malheureusement, le cerveau de notre sujet ne sera jamais correctement calibré. L'adrénaline déferlera sur les récepteurs synaptiques. Le cortisol crèvera le plafond de l'inhibition Comme un film enregistré sur cassette vidéo, les couleurs baveront et les contours s'effaceront. Les bruits ambiants deviendront une bande sonore déroulée à l'envers, pâteuse et inintelligible.

Dans un interminable hurlement, la bête terrifiée de cette histoire jettera une chaise sur le pauvre mec qui voulait simplement parler. Que des mots, des petites menaces et des excuses en retour. Et tout le monde rentre chez soi gentillement.

Mais ce soir, il recevra une pluie de coup. Le visage bien sûr. Énormément. Mais aussi dans les reins, les testicules, l'arrière de la tête.

Il y aura des débuts de “s'il vous plaît”, de “je m'excu-”, des gargarismes et beaucoup plus de coups. Des coups qui flinguent.

Les oreilles de Dan n'entendront rien de cela. Seulement la sirène d'une ambulance au loin. Elle sera en ce moment décalé, la validation de ses agissements, la rumeur lointaine d'un public satisfait.

Et le hurlement. Il hurlera, hurlera, hurlera jusqu'à la fin des temps, l'arrivée des quatre chevaliers de l'apocalypse, le jugement dernier d'un tribunal de haute instance et qui sait, la peine de mort.

Quand le cœur battra jusqu'à devenir un bassin d'acide chloridrique sous sa cage thoracique, le corps vidé de son énergie s'assoira tremblant, et tout deviendra silencieux.

Une instance de Dan qui sera plus un espace réservé que l'être lui-même regardera robotiquement dans la direction de Gabriel. Les yeux de Dan se rempliront de liquide lacrymal. Le visage de son vieil ami et confident, ce phare de paix et de certitude qui l'aura guidé hors de la fange et de la haine de soi. Ce visage si beau aura une expression qu'il n'oubliera jamais. Un regard avide et satisfait.

Tous deux resteront immobiles, dans une sacrilège communion. Tissant un pacte que seule la mort pourra défaire.

Puis la redescente s'amorcera. Et tous deux se sentiront comme des merdes. Ils trembleront et pleureront en silence, boiront comme des trous jusqu'aux premières lueurs.

Et personnes n'aura appelé les flics.

L'histoire de ce cœur qui bat dans l'obscurité ne s'achève pas là.

Lorsque les premiers travailleurs seront sortis de chez eux pour s'entasser dans les premières rames du métro, le méthodique, organisé et impartial Gabriel aura déjà un plan établi. Un voyage sans retour. Les Amériques. Pas d'au revoir, aller simple.

Une petite somme se sera accumulée à l'écart du regard de Flouz, sur un compte inconnu de Dan. Ils pourront compter dessus.

Les locaux n'auront jamais été signés de leur vrai nom. Quand bien même, ils devront faire profil bas pendant des années.

Lorsqu'ils prendront le métro, leur visage émacié sera indiscernable des autres visages de travailleurs de nuit rentrant chez eux pour s'écraser dans leur lit.

A l'aéroport, le cerveau comprendra que c'est un adieu. Gabriel aura de la famille lointaine qu'il pourra rejoindre en Amérique du Sud. Rester ensemble au même endroit sera trop dangereux. Pour le faciès caucasien, destination Québec. Pour le bronzé, Bolivie.

Une fois assis dans son siège d'avion, le cerveau n'aura qu'une envie, se suicider. En finir avec toute cette merde. Il réfléchira aux possibilités de le faire, et ne trouvera aucun potentiel létal dans les couteaux en plastique servis au repas micro-onde. Alors il atterrira à Montréal.

Suite : Serveur confusion - ep. 08 - Instance

7
submitted 10 months ago* (last edited 9 months ago) by [email protected] to c/[email protected]
 

Post croise de https://jlai.lu/post/417665

Suite de Serveur confusion - ep. 05 - Copier

Premier épisode ici

Feed

Mesdames et Messieurs, bonsoir.

Vous êtes à l’écoute de notre émission hebdomadaire, Actualités et Découvertes, sur Radio Culture. Comme tous les dimanches soir, nous revoyons ensemble les évènements qui ont fait l'actualité de la semaine.

Rappelons les titres marquants de cette semaine du 5 février.

Le dernier panda de son espèce, Tanukisan, vient de fêter ses 4 ans.

Le télescope James Webb confirme la rumeur circulant sur internet depuis une semaine. Il existe bien un point de couleur fuchsia, au sein de notre galaxie.

Un nouveau point sonore est soudainement apparu dans la nuit du 2 au 3 février, dans la région du Gers. Les scientifiques, spirituels et curieux de tous bords, se sont déjà amassés autour de l'élément paranormal.

Au japon, le dernier panda, Tanukisan vient de fêter ses 4 ans. Le panda, en tant qu'espèce, est devenu un symbole fort de la culture nippone depuis trois ans, après que la dernière femelle ne se soit éteinte. Souvenirs, porte-bonheur et gâteaux à l'effigie de la nouvelle mascotte, font fureur au pays du soleil levant. À l'occasion de cet anniversaire, un festival qui se déroule au travers du pays rassemble adultes et enfants, jusqu'à la fin de semaine prochaine. Le mot-clé “#tanukisangambatte” se relaie sur les réseaux sociaux, en soutien à l'animal. À l'occasion, le gouvernement japonais a déclaré le jour d'aujourd'hui, nouvelle journée fériée.

Le télescope Webb a retourné des images démontrant l'apparition d'un point de couleur fuchsia, quelque part dans notre galaxie. Cette image vient à confirmer les témoignages d'observateurs du monde entier qui commençaient à partager leurs propres captures, depuis plusieurs jours déjà. Le porte-parole de l'Agence Spaciale Européenne, dans une déclaration plus tôt aujourd'hui, nous indiquait que le point a des spécificités comme nul autre corps astral connu. Sa distance à la Terre ne peut être mesurée par des méthodes traditionnelles. Je laisse la parole à notre collègue Noël Abbadi, de la rubrique Sciences Étonnantes, qui saura expliquer cette déclaration en de meilleurs termes.

« Noël, pouvez-vous nous dire en quelques mots ce que signifie la déclaration de l'agence Européenne ? »

« Bonjour Michel. Oui donc, pour faire court, le point que nous observons ne change pas de taille selon d'où nous l'observons.
« L'image capturée par un télescope situé dans l'Équateur par exemple, sera identique à celle d'un télescope situé en Antarctique. Le point aura la même taille, même couleur, même forme. À l'œil humain, le point est si petit sur ces images, qu'il est normal qu'on ne voie pas de différence.
« Toutefois, les agences spatiales Européenne, Américaine et Japonaise de recherche spatiale, sont arrivés à un consensus, basé sur des calculs précis : le point, bien que “visible”, n'a pas de distance à proprement parler.
« Si pas de distance, il n'a pas de position dans l'espace, comme le démontre le principe de distances Euclidiennes. »

« Pour nos auditeurs, un petit rafraichissement de leurs cours de mathématiques de collège ? »

« Oui alors, le principe de distance Euclidienne est tel que l'on peut déterminer la position d'un point par sa distance à un autre point.
« Or, ce n'est pas le cas ici. Nous pouvons empiriquement déterminer une distance approximative de ce point à ici, par le simple fait que d'autres astres l'éclipsent selon les heures de la journée. Pour simplifier au possible, différents corps célestes “passent” entre ce point et notre planète.
« Mais nous avançons à tâtons, nous n'avons pas d'autre choix que d'observer patiemment ce qui “passe” devant et derrière ce point, pour comprendre où il est "supposé" se situer. »

« C'est un travail de fourmi. »

« Exactement. Je pense que nous devrons attendre plusieurs années avant de mieux comprendre ce “qu'est” cette apparition. Est-ce le premier et le seul, ou en existe-t-il d'autres dans l'Univers, hors de portée de nos instruments de mesure ?
« C'est un phénomène historique qui met la communauté scientifique sens dessus dessous et à bien forte raison. Nous sommes tout simplement pris de court, mais cela n'enlève rien à notre émerveillement et curiosité. C'est une période très excitante. »

« Excitant en effet. Merci pour cette explication Noël. »

La communauté de chasseurs d'étoiles est en effervescence et un appel à un deuxième raid de l'aire 51 au Nevada, États-Unis, a été lancé. À ce sujet, nous invitons nos auditeurs à rester modérés dans leur réaction et de ne pas relayer les fausses informations qui se multiplient.

Autre phénomène insolite !

Un nouveau point sonore est spontanément apparu dans le département du Gers, dans la commune de Condom-en-Armagnac. Les touristes et curieux de tous bords ont déjà commencé à visiter la nouvelle anomalie.

Notre journaliste Moussef Bédouin s'est spécialement déplacé au point sonore pour en enregistrer un extrait d'une minute, que nous vous passons immédiatement.

Veuillez noter que ce point sonore est apparu dans le jardin de monsieur Pierre Cabanier, c'est donc une propriété privée. Lorsque nous l'avons contacté, le retraité nous a confié "apprécier la soudaine compagnie", alors qu'il vit seul. Toutefois, il a commencé à faire payer l'entrée… Houlà, une trentaine d'euros. Gardez votre portefeuille à portée de main, si vous faites le voyage.

Comme vous pouvez l'entendre dans l'enregistrement, nous percevons les sons d'une ville. Il s'avère qu'une communauté d'internautes a déjà pu identifier le modèle d'une des voitures entendues. C'est le modèle S30 de la marque Nissan, produit exclusivement au Japon entre les années 1969 et 1978. Nous pouvons également percevoir dans les bruits du lieu, des individus discuter en langue japonaise. Alors, le son que nous pouvons entendre dans le jardin de monsieur Pierre Cabanier, provient-il d'une ville Japonaise des années 70 ? Exprimez-vous dans les réseaux sociaux et nous commenterons sur vos réactions, en fin de soirée.

Un message de précaution cependant. Bien qu'inoffensifs, ces phénomènes surnaturels ne sont pas sans rappeler la tragédie de la ville de Kars, Turquie, dans le début des années 2000, où rappelons-le, un son de volume extraordinaire a provoqué une onde de choc destructrice. Nous ne connaissons toujours pas la cause de la catastrophe, si ce n'est que le son qui s'est propagé était un enregistrement d'une émission russe. Cela a entretenu depuis lors, des tensions entre les pays d'Europe occidentale et d'Asie centrale.

Myriam Bellamy, vous êtes l'un de nos envoyés spéciaux qui s'est déplacé à travers le Monde pour nous retransmettre les enregistrements d'autres émissions sonores qui sont mystérieusement apparues dans déjà trois pays à travers le Monde.

Dans la ville de Ruzhou, province du Henan en Chine, supposément des enfants qui s'expriment dans une langue morte à l'intérieur d'un lieu d'éducation.

Dans le district de Enjil, province d'Hérât, en Afghanistan, où vous avez eu peine à vous déplacer, en raison des politiques internes au pays, n'est-ce pas. Vous nous rapportiez à l'époque entendre de la musique rock'N Roll des années cinquante, et les sons habituels d'un bar américain.

Dans une grotte de la région de Boedy, sur l'île de Madagascar. Ce point-ci est le plus étrange, n'est-ce pas. Comme nous le surnommons “le bip”, nous pouvons seulement entendre un bip à intervalle irrégulier et rien d'autre.

« Alors vous qui avez pu en témoigner de visu, qu'en pensez-vous Myriam, vos impressions ? »

« Écoutez Michel, il va sans dire que ces phénomènes sont pour le moins dérangeants. Pourtant, et ce n'est que mon avis personnel, nous sommes à un âge où le Monde devient de plus en plus incompréhensible, avec ces phénomènes étranges et inexpliqués qui se multiplient mois après mois. Dans d'autres nouvelles plus terre-à-terre, les tensions entre Union Européenne, États-Unis et Asie centrale se durcissent. Ces points sonores sont une distraction bienvenue aux autres inquiétudes qui peuplent notre quotidien ces derniers temps. Au cours de mes voyages, j'étais heureuse de voir des sourires sur les visages des visiteurs, alors que nous devenons de plus en plus, et à juste raison, apathiques face aux évènements de notre actualité.
« J'ai particulièrement apprécié m'assoir près du point de Ruzhou en Chine, et écouter les enfants chanter et rire. Soit dit en passant, des chercheurs en linguistique ont émis l'hypothèse que la langue entendue soit du Sumérien, parlée jusqu'à 2000 ans avant Jésus-Christ. C'est tout de même incroyable, nous pouvons aujourd'hui entendre des sons disparus depuis des temps immémoriaux. Par ailleurs, l'arrivée de touristes dans les points reculés de Chine, Afghanistan et Madagascar boostent l'économie de ces régions. C'est 100% positif à mes yeux. »

« Haha en effet, c'est un point de vue intéressant. Un peu de positivisme ne fait effectivement pas de mal. Eh bien merci Myriam, à une très prochaine fois dans l'émission Actualités et Découvertes. »

« Merci. »

Chers auditeurs, vous étiez à l'écoute de l'émission Actualités et Découvertes, sur Radio Culture. Comme tous les dimanches, nous vous y rappelons les titres de l'actualité de la semaine.

Restez à l'écoute pour la prochaine émission de la soirée, “Deep fake, fake news, comment s'y retrouver”.

Merci, à dimanche prochain.

9
submitted 10 months ago* (last edited 9 months ago) by [email protected] to c/[email protected]
 

Suite de Serveur confusion - ep. 05 - Copier

Premier épisode ici

Feed

Mesdames et Messieurs, bonsoir.

Vous êtes à l’écoute de notre émission hebdomadaire, Actualités et Découvertes, sur Radio Culture. Comme tous les dimanches soir, nous revoyons ensemble les évènements qui ont fait l'actualité de la semaine.

Rappelons les titres marquants de cette semaine du 5 février.

Le dernier panda de son espèce, Tanukisan, vient de fêter ses 4 ans.

Le télescope James Webb confirme la rumeur circulant sur internet depuis une semaine. Il existe bien un point de couleur fuchsia, au sein de notre galaxie.

Un nouveau point sonore est soudainement apparu dans la nuit du 2 au 3 février, dans la région du Gers. Les scientifiques, spirituels et curieux de tous bords, se sont déjà amassés autour de l'élément paranormal.

Au japon, le dernier panda, Tanukisan vient de fêter ses 4 ans. Le panda, en tant qu'espèce, est devenu un symbole fort de la culture nippone depuis trois ans, après que la dernière femelle ne se soit éteinte. Souvenirs, porte-bonheur et gâteaux à l'effigie de la nouvelle mascotte, font fureur au pays du soleil levant. À l'occasion de cet anniversaire, un festival qui se déroule au travers du pays rassemble adultes et enfants, jusqu'à la fin de semaine prochaine. Le mot-clé “#tanukisangambatte” se relaie sur les réseaux sociaux, en soutien à l'animal. À l'occasion, le gouvernement japonais a déclaré le jour d'aujourd'hui, nouvelle journée fériée.

Le télescope Webb a retourné des images démontrant l'apparition d'un point de couleur fuchsia, quelque part dans notre galaxie. Cette image vient à confirmer les témoignages d'observateurs du monde entier qui commençaient à partager leurs propres captures, depuis plusieurs jours déjà. Le porte-parole de l'Agence Spaciale Européenne, dans une déclaration plus tôt aujourd'hui, nous indiquait que le point a des spécificités comme nul autre corps astral connu. Sa distance à la Terre ne peut être mesurée par des méthodes traditionnelles. Je laisse la parole à notre collègue Noël Abbadi, de la rubrique Sciences Étonnantes, qui saura expliquer cette déclaration en de meilleurs termes.

« Noël, pouvez-vous nous dire en quelques mots ce que signifie la déclaration de l'agence Européenne ? »

« Bonjour Michel. Oui donc, pour faire court, le point que nous observons ne change pas de taille selon d'où nous l'observons.
« L'image capturée par un télescope situé dans l'Équateur par exemple, sera identique à celle d'un télescope situé en Antarctique. Le point aura la même taille, même couleur, même forme. À l'œil humain, le point est si petit sur ces images, qu'il est normal qu'on ne voie pas de différence.
« Toutefois, les agences spatiales Européenne, Américaine et Japonaise de recherche spatiale, sont arrivés à un consensus, basé sur des calculs précis : le point, bien que “visible”, n'a pas de distance à proprement parler.
« Si pas de distance, il n'a pas de position dans l'espace, comme le démontre le principe de distances Euclidiennes. »

« Pour nos auditeurs, un petit rafraichissement de leurs cours de mathématiques de collège ? »

« Oui alors, le principe de distance Euclidienne est tel que l'on peut déterminer la position d'un point par sa distance à un autre point.
« Or, ce n'est pas le cas ici. Nous pouvons empiriquement déterminer une distance approximative de ce point à ici, par le simple fait que d'autres astres l'éclipsent selon les heures de la journée. Pour simplifier au possible, différents corps célestes “passent” entre ce point et notre planète.
« Mais nous avançons à tâtons, nous n'avons pas d'autre choix que d'observer patiemment ce qui “passe” devant et derrière ce point, pour comprendre où il est "supposé" se situer. »

« C'est un travail de fourmi. »

« Exactement. Je pense que nous devrons attendre plusieurs années avant de mieux comprendre ce “qu'est” cette apparition. Est-ce le premier et le seul, ou en existe-t-il d'autres dans l'Univers, hors de portée de nos instruments de mesure ?
« C'est un phénomène historique qui met la communauté scientifique sens dessus dessous et à bien forte raison. Nous sommes tout simplement pris de court, mais cela n'enlève rien à notre émerveillement et curiosité. C'est une période très excitante. »

« Excitant en effet. Merci pour cette explication Noël. »

La communauté de chasseurs d'étoiles est en effervescence et un appel à un deuxième raid de l'aire 51 au Nevada, États-Unis, a été lancé. À ce sujet, nous invitons nos auditeurs à rester modérés dans leur réaction et de ne pas relayer les fausses informations qui se multiplient.

Autre phénomène insolite !

Un nouveau point sonore est spontanément apparu dans le département du Gers, dans la commune de Condom-en-Armagnac. Les touristes et curieux de tous bords ont déjà commencé à visiter la nouvelle anomalie.

Notre journaliste Moussef Bédouin s'est spécialement déplacé au point sonore pour en enregistrer un extrait d'une minute, que nous vous passons immédiatement.

Veuillez noter que ce point sonore est apparu dans le jardin de monsieur Pierre Cabanier, c'est donc une propriété privée. Lorsque nous l'avons contacté, le retraité nous a confié "apprécier la soudaine compagnie", alors qu'il vit seul. Toutefois, il a commencé à faire payer l'entrée… Houlà, une trentaine d'euros. Gardez votre portefeuille à portée de main, si vous faites le voyage.

Comme vous pouvez l'entendre dans l'enregistrement, nous percevons les sons d'une ville. Il s'avère qu'une communauté d'internautes a déjà pu identifier le modèle d'une des voitures entendues. C'est le modèle S30 de la marque Nissan, produit exclusivement au Japon entre les années 1969 et 1978. Nous pouvons également percevoir dans les bruits du lieu, des individus discuter en langue japonaise. Alors, le son que nous pouvons entendre dans le jardin de monsieur Pierre Cabanier, provient-il d'une ville Japonaise des années 70 ? Exprimez-vous dans les réseaux sociaux et nous commenterons sur vos réactions, en fin de soirée.

Un message de précaution cependant. Bien qu'inoffensifs, ces phénomènes surnaturels ne sont pas sans rappeler la tragédie de la ville de Kars, Turquie, dans le début des années 2000, où rappelons-le, un son de volume extraordinaire a provoqué une onde de choc destructrice. Nous ne connaissons toujours pas la cause de la catastrophe, si ce n'est que le son qui s'est propagé était un enregistrement d'une émission russe. Cela a entretenu depuis lors, des tensions entre les pays d'Europe occidentale et d'Asie centrale.

Myriam Bellamy, vous êtes l'un de nos envoyés spéciaux qui s'est déplacé à travers le Monde pour nous retransmettre les enregistrements d'autres émissions sonores qui sont mystérieusement apparues dans déjà trois pays à travers le Monde.

Dans la ville de Ruzhou, province du Henan en Chine, supposément des enfants qui s'expriment dans une langue morte à l'intérieur d'un lieu d'éducation.

Dans le district de Enjil, province d'Hérât, en Afghanistan, où vous avez eu peine à vous déplacer, en raison des politiques internes au pays, n'est-ce pas. Vous nous rapportiez à l'époque entendre de la musique rock'N Roll des années cinquante, et les sons habituels d'un bar américain.

Dans une grotte de la région de Boedy, sur l'île de Madagascar. Ce point-ci est le plus étrange, n'est-ce pas. Comme nous le surnommons “le bip”, nous pouvons seulement entendre un bip à intervalle irrégulier et rien d'autre.

« Alors vous qui avez pu en témoigner de visu, qu'en pensez-vous Myriam, vos impressions ? »

« Écoutez Michel, il va sans dire que ces phénomènes sont pour le moins dérangeants. Pourtant, et ce n'est que mon avis personnel, nous sommes à un âge où le Monde devient de plus en plus incompréhensible, avec ces phénomènes étranges et inexpliqués qui se multiplient mois après mois. Dans d'autres nouvelles plus terre-à-terre, les tensions entre Union Européenne, États-Unis et Asie centrale se durcissent. Ces points sonores sont une distraction bienvenue aux autres inquiétudes qui peuplent notre quotidien ces derniers temps. Au cours de mes voyages, j'étais heureuse de voir des sourires sur les visages des visiteurs, alors que nous devenons de plus en plus, et à juste raison, apathiques face aux évènements de notre actualité.
« J'ai particulièrement apprécié m'assoir près du point de Ruzhou en Chine, et écouter les enfants chanter et rire. Soit dit en passant, des chercheurs en linguistique ont émis l'hypothèse que la langue entendue soit du Sumérien, parlée jusqu'à 2000 ans avant Jésus-Christ. C'est tout de même incroyable, nous pouvons aujourd'hui entendre des sons disparus depuis des temps immémoriaux. Par ailleurs, l'arrivée de touristes dans les points reculés de Chine, Afghanistan et Madagascar boostent l'économie de ces régions. C'est 100% positif à mes yeux. »

« Haha en effet, c'est un point de vue intéressant. Un peu de positivisme ne fait effectivement pas de mal. Eh bien merci Myriam, à une très prochaine fois dans l'émission Actualités et Découvertes. »

« Merci. »

Chers auditeurs, vous étiez à l'écoute de l'émission Actualités et Découvertes, sur Radio Culture. Comme tous les dimanches, nous vous y rappelons les titres de l'actualité de la semaine.

Restez à l'écoute pour la prochaine émission de la soirée, “Deep fake, fake news, comment s'y retrouver”.

Merci, à dimanche prochain.

Suite : Serveur confusion - ep. 07 - Placeholder

 

À partir d'aujourd'hui, vous êtes tou(te)s bienvenu(e)s à poster des consignes d'écriture dans cette communauté.

Qu'est-ce qu'une consigne d'écriture ?

Une consigne d'écriture est un sujet ou thème que l'on propose, et sur lequel les auteur(e)s de cette communauté s'exerceront à développer en narration.

Comment créer une consigne d'écriture ?

  • Postez une proposition, en ajoutant l'étiquette [consigne] en début de titre.

  • La consigne doit être dans le titre, et non dans la description du post.

  • Le sujet est libre. La consigne peut être par exemple l'extrait fictif d'une histoire, un ensemble de conditions, ou le synopsis de la narration que les auteurs vont écrire.

Comment créer une narration répondant à la consigne ?

  • Chaque auteur(e) peut s'essayer à créer une narration à partir du titre, en l'écrivant en commentaire de la discussion de la consigne.

  • Tous les commentaires de la discussion doivent être une narration créée à partir de la consigne.

  • Les lecteurs peuvent donner leur avis sur une narration, en écrivant un sous-commentaire, au-dessous de la narration.

Exemples

[consigne] "Lève-toi, nous avons beaucoup de choses à nous dire". Je pourrais reconnaitre cette voix entre mille. Celle de mon père, disparu depuis 20 ans.

[consigne] Aussi longtemps que vous vous en souvenez, vous êtes un fier Cassiopien, élevé sur Cassiope X-II. Aucun Cassiopien n'a vu d'autre humain à part vous, jusqu'à aujourd'hui. Jour où un vaisseau humain atterri dans votre village.

[consigne] Écrivez un poème en dix lignes. La première ligne doit faire exactement dix mots, la seconde neuf mots, etc.

Si vous avez d'autres idées de format ou de consigne, n'hésitez pas à les proposer en commentaires de ce fil !

[–] [email protected] 3 points 10 months ago

Sympa :)
Garde le bien en tête, je poste les consignes dès ce weekend.

[–] [email protected] 3 points 10 months ago (1 children)

Consignes d’écriture ça marcherait comme traduction ou ça fait trop rigide ?

Requête d'écriture ? Ou consigne fonctionne également, de mon point de vue.

Si tu fais un post pour ça je le mettrai en épinglé.

Ça marche !

PS: j’ai de la lecture à rattraper sur tes nouvelles, mais je voulais te dire que c’est cool de continuer à les poster.

Merci de tes encouragements, ça me motive :)

 

De l'anglais writing prompt. Je ne connais pas la traduction exacte.
Dans le titre d'un post, une description d'un début d'histoire. Chaque commentaire du post est une nouvelle écrite à partir de la description.
Exemple de la communauté /r/writingprompt sur Reddit https://www.reddit.com/r/writingprompt/comments/fv9fek/wp_there_is_an_unbroken_rule_in_your_household/

Il existe dans votre foyer une règle immuable, établie par votre arrière-grand-père de son vivant : personne ne doit jamais pénétrer dans le grenier. Un beau jour, pris de curiosité, vous décidez d'aller y jeter un coup d'œil. Vous y trouvez votre arrière-grand-père en train de jouer aux cartes avec ses meilleurs amis.

Avis ?

 

Post croise de https://jlai.lu/post/315726

Suite de Serveur confusion - ep. 04 - GPU

Premier épisode ici

Copier

Si vous lisez ce texte, laissez-moi vous dire une chose. Je suis encore dans les parages.

J'ai commencé à écrire ce journal pour passer le temps et arrêter d'oublier des détails de ma vie. Le tout est enregistré sur un cloud décentralisé, basé sur une blockchain. Grâce à cette technologie supposée renversante, le fournisseur du service le vante comme suit : 
“Un cloud aux données garanties permanentes.”

J'en ris. Pas aux larmes, mais c'est suffisant pour expirer un peu d'air de mon nez. 200 ans et plus de stockage, n'a rien de permanent. D'ailleurs, que ce passera-t-il lorsque tous les ordinateurs nœud de cette blockchain seront finalement éteints ? Cela signifiera une chose ou l'autre, la société telle que je la connais aujourd'hui se sera effondrée ou ces bêtises technologiques d'un monde 2.0 ne seront finalement plus au gout du jour. Mais je peux seulement vous garantir une chose : je serai encore dans les parages.

Donc si vous lisez ce texte, je vous félicite. Vous faites maintenant partie d'une élite incroyable, au pouvoir de craquer une clé d'encryptage sha256 en moins de plusieurs milliards de milliards d'années. J'ose imaginer que les ordinateurs quantiques se sont finalement démocratisés alors. Ou théoriquement, avez-vous réussi à voler ma clé privée. Comme si vous ayez été en pouvoir de me voler quoi que ce soit. Vous ne pouvez pas le voir, mais je ris en écrivant cela. Je me moque de vous. Je pousse de l'air de mon nez à votre dépit.
Non, autant cela m'ennuie de l'admettre, il y a plus de chances que vous n'existiez simplement pas. Cela m'attriste un peu, mais je suis presque sûr d'écrire ces lignes pour me défouler, et les livrer au silence familièrement borné du néant.

Mais je vais jouer le jeu. Pendant un instant, quoi que vous soyez, vous allez être mon intime confident et mon meilleur ami pour la vie.

Au début, on tombe amoureux, on construit une famille. Une fois, deux fois, même au bout de dix fois, une autre âme nous touche. Une autre étincelle jaillit le temps d’un énième amour. Mais comme pour les guerres, après quelques dizaines, soyons réaliste. Ça ne fait plus rien.
Je ne méprise pas les mortels. Mais voyons les choses en face, nous ne sommes plus de la même espèce. Vous avez déjà interféré avec une colonne de fourmis ? Vous avez vu comme elle se reforme ? Et bien l’Humanité c’est pareil. Même le plus innommable des génocides, le Monde oublie après quelques décennies.

Vos livres ont marqué la naissance de grands mouvements, refait le monde. Vos musiques ont fait marcher des générations à la guerre ou ont rapproché des peuples qui n'avaient rien en commun. Votre art est beau et unique et vivant, à votre image. Or, savez-vous pourquoi la poussière est toujours grise ? La poussière aussi est un fourmillement, une plénitude de vies et de richesses. Alors pourquoi à vos yeux c'est gris ? Il y a beau y avoir au détail tout un monde de peaux mortes, poils de chat et d'humain, cheveux, particules de nourriture et d'excréments, acariens morts et vivants. Fibres de vêtements, particules de plomb ou de PVC, traces de peinture, de fumée de cigarette et gaz de voitures. À vos yeux, c'est gris. Pourquoi ?

Il s'avère que tous ces éléments mis ensemble sont terminalement infinitésimaux. Si bien que la lumière ne peut interagir correctement avec eux. Lisez si insignifiants, qu'ils n'ont pas de couleur. Vous voyez où je veux en venir. C'est une métaphore pour dire que votre monde est en noir et blanc, dans un univers dont moi seul voit les couleurs. Et c'est pour ça que je m'ennuie à mourir. Ne tournons pas autour du pot.

Oh, j'étais comme vous il y a des temps immémoriaux. Je suis né d'une mère comme vous et j'ai grandi, comme vous tous. Nous n'avions pas le chauffage à cette époque. Ni des tennis confectionnés par des esclaves de l'autre bout du Monde, pour courir confortablement. Pas de fibre de verre pour isoler nos murs, et certainement pas de transports en commun. La vie était plus calme, et certainement moins peuplée, il va sans dire.

Je ne me souviens pas des visages de mes proches, les détails sont flous. Mais je me souviens être tombé malade. Nous ne savions pas ce qu'était un virus a cette époque, et je ne comprenais pas que la grippe menaçait de m'emporter heure après heure. Mes géniteurs ont pleuré à mon chevet. Il se préparaient à me voir partir dans un délire fiévreux.

Mais j'ai survécu.  Puis j'ai survécu à leur mort. J'ai survécu à la guerre qui a ravagé mon pays natal. 

Puis j'ai survécu aux autres guerres qui se comptent par centaines. S'il y a bien une chose que vous aimez, c'est la guerre.  Fort heureusement, les matchs UFC et les débats houleux existent pour vous défouler aujourd'hui. Vous n'avez pas idée.

C'est un bien évident euphémisme mais : Il va sans dire que je m'ennuie. 

À l'évidence, j'ai bien essayé de me divertir de par toutes les activités possibles et imaginables. Pour être franc avec vous, j'en ai d'ailleurs perdu le compte. Il était question de sauver des vies, mettre fin à des conflits nationaux. Sensations fortes, saut en parachute. Essayez de sauter d’un avion quand vous ne pouvez pas mourir, vous ! Ça ne vous procurera pas le moindre frisson, je vous le garantis.
Parfois l'ennui monochrome et la solitude m’étreignent et frappent si fort que je me replie sur moi. S’ensuivent 30 ans,50 ans,70 ans, de réclusion dans une grotte ou sur un sommet de montagne. Mais je suis toujours de retour.

Il n'existe pour moi qu'un seul passe-temps. Vous trouverez sans doute le sujet délicat et je m'amuse de l'hypocrisie. Mais je comprends. Alors comprenez à votre tour que même la mort tragique d’un être qui vous est cher, quand bien même votre monde s’écroule, l’Univers s’en fout. Et si l’Univers s’en fout, moi je m’en fous aussi. Un humain est un amas de cellules divisible, un corps en décrépitude qui se meut. Dans quelques décennies, il n’y aura plus de trace de votre passage. Tout le monde est remplaçable ; à part moi.

Je suis un junkie d’adrénaline. Ce shoot que mon cerveau reptilien continue de me fournir jusqu’à aujourd’hui. Rien, vraiment rien ne me distrait comme tuer.

C’est vrai que les premiers siècles de ma vie, c’était un peu perturbant. L’empathie frappe et l’on se sent mal à l’aise. On se retrouve même à se confondre en excuse face au regard vitreux du corps qui s’affaisse. Puis au fur et à mesure, on accepte l’évidence. Vous n’êtes rien de plus que de beaux papillons éphémères. Tous différents et tous semblables. À la lisière de votre vie, c’est à-peu-près continuellement la même histoire. Vous suppliez et négociez. Puis, vous vous mettez en colère. Et à la fin, vous vous résignez. Ou une autre combinaison du même genre. Enfin, vu votre ridicule espérance de vie, à tous, imaginez bien que votre réaction, c’est presque du copier-coller.

Mais Léon, je dois avouer qu’il est différent.
Léon, c'est le premier ami que j’aie eu depuis une éternité. Léon quand je l’ai menacé avec une arme il a pas cherché à s’enfuir ou me désarmer. Il s’est pas mis à genoux, il a pas hurlé.
Léon, il s’est mis à me raconter des blagues. De bonnes blagues en plus, je sais pas d’où il tient ça, c’est incroyable. Il nous arrive encore de nous asseoir parfois et pendant des heures, je ris aux larmes de ses histoires. Il est vraiment unique au monde.
    Or, le temps lui est aussi compté, à mon ami. Et lorsque je le regarde dormir avec ses cheveux grisonnants, je ne vois rien d’autre que son échéance prochaine. Ça me brise le cœur. La tristesse et l’urgence de sa courte vie me pèsent alors si fort, que je frappe d’un coup sec aux barreaux de sa cage. Comme à chaque fois, il sursautera et s’assoira dans un souffle. La gueule enfarinée, les yeux rougis et cernés il regardera dans ma direction. Il regardera vers moi et dira la voix tremblante :
“OK patron, de quoi on veut parler aujourd’hui ?”

Et de cette voix éclatera un petit rire nerveux.

 

Suite de Serveur confusion - ep. 04 - GPU

Premier épisode ici

Copier

Si vous lisez ce texte, laissez-moi vous dire une chose. Je suis encore dans les parages.

J'ai commencé à écrire ce journal pour passer le temps et arrêter d'oublier des détails de ma vie. Le tout est enregistré sur un cloud décentralisé, basé sur une blockchain. Grâce à cette technologie supposée renversante, le fournisseur du service le vante comme suit : 
“Un cloud aux données garanties permanentes.”

J'en ris. Pas aux larmes, mais c'est suffisant pour expirer un peu d'air de mon nez. 200 ans et plus de stockage, n'a rien de permanent. D'ailleurs, que ce passera-t-il lorsque tous les ordinateurs nœud de cette blockchain seront finalement éteints ? Cela signifiera une chose ou l'autre, la société telle que je la connais aujourd'hui se sera effondrée ou ces bêtises technologiques d'un monde 2.0 ne seront finalement plus au gout du jour. Mais je peux seulement vous garantir une chose : je serai encore dans les parages.

Donc si vous lisez ce texte, je vous félicite. Vous faites maintenant partie d'une élite incroyable, au pouvoir de craquer une clé d'encryptage sha256 en moins de plusieurs milliards de milliards d'années. J'ose imaginer que les ordinateurs quantiques se sont finalement démocratisés alors. Ou théoriquement, avez-vous réussi à voler ma clé privée. Comme si vous ayez été en pouvoir de me voler quoi que ce soit. Vous ne pouvez pas le voir, mais je ris en écrivant cela. Je me moque de vous. Je pousse de l'air de mon nez à votre dépit.
Non, autant cela m'ennuie de l'admettre, il y a plus de chances que vous n'existiez simplement pas. Cela m'attriste un peu, mais je suis presque sûr d'écrire ces lignes pour me défouler, et les livrer au silence familièrement borné du néant.

Mais je vais jouer le jeu. Pendant un instant, quoi que vous soyez, vous allez être mon intime confident et mon meilleur ami pour la vie.

Au début, on tombe amoureux, on construit une famille. Une fois, deux fois, même au bout de dix fois, une autre âme nous touche. Une autre étincelle jaillit le temps d’un énième amour. Mais comme pour les guerres, après quelques dizaines, soyons réaliste. Ça ne fait plus rien.
Je ne méprise pas les mortels. Mais voyons les choses en face, nous ne sommes plus de la même espèce. Vous avez déjà interféré avec une colonne de fourmis ? Vous avez vu comme elle se reforme ? Et bien l’Humanité c’est pareil. Même le plus innommable des génocides, le Monde oublie après quelques décennies.

Vos livres ont marqué la naissance de grands mouvements, refait le monde. Vos musiques ont fait marcher des générations à la guerre ou ont rapproché des peuples qui n'avaient rien en commun. Votre art est beau et unique et vivant, à votre image. Or, savez-vous pourquoi la poussière est toujours grise ? La poussière aussi est un fourmillement, une plénitude de vies et de richesses. Alors pourquoi à vos yeux c'est gris ? Il y a beau y avoir au détail tout un monde de peaux mortes, poils de chat et d'humain, cheveux, particules de nourriture et d'excréments, acariens morts et vivants. Fibres de vêtements, particules de plomb ou de PVC, traces de peinture, de fumée de cigarette et gaz de voitures. À vos yeux, c'est gris. Pourquoi ?

Il s'avère que tous ces éléments mis ensemble sont terminalement infinitésimaux. Si bien que la lumière ne peut interagir correctement avec eux. Lisez si insignifiants, qu'ils n'ont pas de couleur. Vous voyez où je veux en venir. C'est une métaphore pour dire que votre monde est en noir et blanc, dans un univers dont moi seul voit les couleurs. Et c'est pour ça que je m'ennuie à mourir. Ne tournons pas autour du pot.

Oh, j'étais comme vous il y a des temps immémoriaux. Je suis né d'une mère comme vous et j'ai grandi, comme vous tous. Nous n'avions pas le chauffage à cette époque. Ni des tennis confectionnés par des esclaves de l'autre bout du Monde, pour courir confortablement. Pas de fibre de verre pour isoler nos murs, et certainement pas de transports en commun. La vie était plus calme, et certainement moins peuplée, il va sans dire.

Je ne me souviens pas des visages de mes proches, les détails sont flous. Mais je me souviens être tombé malade. Nous ne savions pas ce qu'était un virus a cette époque, et je ne comprenais pas que la grippe menaçait de m'emporter heure après heure. Mes géniteurs ont pleuré à mon chevet. Il se préparaient à me voir partir dans un délire fiévreux.

Mais j'ai survécu.  Puis j'ai survécu à leur mort. J'ai survécu à la guerre qui a ravagé mon pays natal. 

Puis j'ai survécu aux autres guerres qui se comptent par centaines. S'il y a bien une chose que vous aimez, c'est la guerre.  Fort heureusement, les matchs UFC et les débats houleux existent pour vous défouler aujourd'hui. Vous n'avez pas idée.

C'est un bien évident euphémisme mais : Il va sans dire que je m'ennuie. 

À l'évidence, j'ai bien essayé de me divertir de par toutes les activités possibles et imaginables. Pour être franc avec vous, j'en ai d'ailleurs perdu le compte. Il était question de sauver des vies, mettre fin à des conflits nationaux. Sensations fortes, saut en parachute. Essayez de sauter d’un avion quand vous ne pouvez pas mourir, vous ! Ça ne vous procurera pas le moindre frisson, je vous le garantis.
Parfois l'ennui monochrome et la solitude m’étreignent et frappent si fort que je me replie sur moi. S’ensuivent 30 ans,50 ans,70 ans, de réclusion dans une grotte ou sur un sommet de montagne. Mais je suis toujours de retour.

Il n'existe pour moi qu'un seul passe-temps. Vous trouverez sans doute le sujet délicat et je m'amuse de l'hypocrisie. Mais je comprends. Alors comprenez à votre tour que même la mort tragique d’un être qui vous est cher, quand bien même votre monde s’écroule, l’Univers s’en fout. Et si l’Univers s’en fout, moi je m’en fous aussi. Un humain est un amas de cellules divisible, un corps en décrépitude qui se meut. Dans quelques décennies, il n’y aura plus de trace de votre passage. Tout le monde est remplaçable ; à part moi.

Je suis un junkie d’adrénaline. Ce shoot que mon cerveau reptilien continue de me fournir jusqu’à aujourd’hui. Rien, vraiment rien ne me distrait comme tuer.

C’est vrai que les premiers siècles de ma vie, c’était un peu perturbant. L’empathie frappe et l’on se sent mal à l’aise. On se retrouve même à se confondre en excuse face au regard vitreux du corps qui s’affaisse. Puis au fur et à mesure, on accepte l’évidence. Vous n’êtes rien de plus que de beaux papillons éphémères. Tous différents et tous semblables. À la lisière de votre vie, c’est à-peu-près continuellement la même histoire. Vous suppliez et négociez. Puis, vous vous mettez en colère. Et à la fin, vous vous résignez. Ou une autre combinaison du même genre. Enfin, vu votre ridicule espérance de vie, à tous, imaginez bien que votre réaction, c’est presque du copier-coller.

Mais Léon, je dois avouer qu’il est différent.
Léon, c'est le premier ami que j’aie eu depuis une éternité. Léon quand je l’ai menacé avec une arme il a pas cherché à s’enfuir ou me désarmer. Il s’est pas mis à genoux, il a pas hurlé.
Léon, il s’est mis à me raconter des blagues. De bonnes blagues en plus, je sais pas d’où il tient ça, c’est incroyable. Il nous arrive encore de nous asseoir parfois et pendant des heures, je ris aux larmes de ses histoires. Il est vraiment unique au monde.
    Or, le temps lui est aussi compté, à mon ami. Et lorsque je le regarde dormir avec ses cheveux grisonnants, je ne vois rien d’autre que son échéance prochaine. Ça me brise le cœur. La tristesse et l’urgence de sa courte vie me pèsent alors si fort, que je frappe d’un coup sec aux barreaux de sa cage. Comme à chaque fois, il sursautera et s’assoira dans un souffle. La gueule enfarinée, les yeux rougis et cernés il regardera dans ma direction. Il regardera vers moi et dira la voix tremblante :
“OK patron, de quoi on veut parler aujourd’hui ?”

Et de cette voix éclatera un petit rire nerveux.

Suite : Serveur confusion - ep. 06 - Flux

4
submitted 11 months ago* (last edited 11 months ago) by [email protected] to c/france
 

Post croisé de https://jlai.lu/post/227197

GPU

Au début, il n'y avait rien. Le noir complet. Le silence absolu.

Puis émergeant du vide, un premier bang. De nouveau le silence. Toujours rien. Les ténèbres.

Vint le deuxième bang. Et un troisième. Et encore un, encore un, puis un autre. Un bruit imparfaitement régulier. Un cheval au galop. Une locomotive à vapeur.

Vous avez pensé que je vous raconterais l'histoire du Big Bang, hein. Non, cette histoire est bien plus ennuyeuse. C'est l'histoire d'un cœur qui bat. Et aussi pas mal celle du cerveau attaché au même corps. Le propriétaire de ce cerveau et de ce cœur se reconnaitra un jour sous le nom de Dan. Mais pour le moment ce n'est pas grand-chose. Et ce pas grand-chose se forme dans l'obscurité.

Sa chair est encore si transparente qu'on en voit les veines, traversées d'un sang clair. Pas encore de métaux lourds emmagasinés par la consommation de cigarette. Le foie est pur et rose et bien formé. Le tout est un joli bouquet garni de chair et d'espoir.

Le rythme de battement du cœur variera peu au fil du temps, si ce n'est à diverses occasions, entre-autres l'assimilation de diverses substances. Par exemple, il s'accèlerera le jour où il dira à Gabriel qu'il l'aime. Mais aussi le jour où dans la cour de récré il se fera humilier par Estelle et le groupe de filles. Mais ce ne sera rien comparé à la première fois où il prendra de la MDMA. Le jour où il tuera un autre humain, sera le plus vite qu'il battra sans une once de doute. Là il frôlera de peu l'arrêt et la mort.

Mais revenons à ce cerveau.

Dans 7 ans, le reste du Monde comprendra qu'il n'est pas très intelligent. Il pourra résoudre des problèmes complexes c'est vrai, plus rapidement que la moyenne. Mais que sont ces aptitudes, si la motricité et la compréhension du langage et des émotions sont en retard de plusieurs années. Les géniteurs de l'organisme de notre histoire sont et resteront pauvres, jeunes et mal guidés. Ils ne sauront pas quoi faire de la spécifité de Dan. Ils le couvriront d'amour, ce qui n'est déjà pas mal, et lui transmettront le sentiment qu'il est très spécial.

Ainsi, Dan entamera la fin de son enfance avec la conviction qu'il est en effet, très spécial.

Dans 14 ans, le cerveau ne sera toujours pas très futé. Son possesseur fera partie de gangs de “cool kids” qui fument, boivent et dealent. Ces gamins apprécieront la naïveté de notre sujet. Il se forcera à rire à toutes leurs blagues, même s'il ne les comprend pas toujours, et fera toutes les tâches risquées sans se poser de questions. Il volera des bouteilles de vodka dans les étalages, insultera les profs parce que ça fait rire la classe. Parce que les autres le feront se sentir spécial.

Dans 15 ans, quand le cerveau fera l'expérience du premier joint, il détestera. Il n'aimera ni le ralentissement, ni la déconnexion forcée des autres membres interconnectés. Mais il s'y fera. Parce que l'activité lui fera se sentir spécial et membre à part entière, du groupe des “cool kids”. Par contre l'alcool deviendra dès lors un vice qu'il gardera longtemps. Un outil redoutable d'intimité synthétique qui lui fera se sentir bien, presque normal. À sa place, au milieu de tous. Et des filles.

Dans 17 ans, Dan fera de la prison. Il se sera fait choper à vendre de la coke et son binôme s'enfuira sans lui, en scooter. Ça sera un tournant pour lui. Il voudra faire autre chose de sa vie pour changer. À sa sortie, il demandera à son cousin de le prendre en essai dans son magasin d'informatique de quartier. Lorsque le rideau de métal se fermera tous les soirs, il s'exercera sur un ordinateur poussiéreux et bruyant, dont le système d'exploitation sera alors dépassé de deux décennies. Il manipulera des tableaux dynamiques, écrira son premier programme. Jouera au solitaire et au démineur.

Dans 21 ans, son cousin comprendra finalement qu'il n'est pas si con. Le petit débile aura écrit son premier algorithme génétique et son premier classeur de tableaux dynamiques en apprentissage automatique. Un jour ou l'autre il en arriverait peut-être même à réclamer les centaines d'heures supplémentaires qui lui sont dues, voire la hausse de son salaire de misère. Il commencera à considérer le pousser à la démission, mais n'aura pas à se donner cette peine : Dan piquait dans la caisse depuis des mois pour s'acheter de la meth.

S'ensuivra une violente altercation ou Dan cèdera à la panique et s'enfuira avec le vieil ordinateur, après avoir asséné un vilain coup à la tête de son cousin. Il le laissera inconscient sur le sol derrière lui, et tous deux ne se reparleront plus jamais.

Dans 23 ans, le cerveau sera aux faits de toutes les théories conspirationnistes de son époque. Elles se compteront par dizaines de milliers et le compte se sera accéléré avec l'air de fin du Monde qui semble se profiler. Les allocations lui permettront de se donner à plaisance à ses activités de recherche à travers la toile. Il en oubliera souvent de se laver, mais qu'importe puisqu'il vivra seul.

Sa première théorie, qu'il écrira à travers un blog, n'attirera aucune attention. Cet essai sera une tentative maladroite de rapprochement de la biologie, au sens large et des systèmes informatiques. Il est vrai que l'article sera mal écrit et incohérent. Or, ce premier article est la raison même pour laquelle cette histoire existe. Il y a plus de cent milliards d'Homo sapiens sapiens nés jusqu'à quelques secondes avant le premier battement de cœur. Or peu d'entre eux auront réussi, à l'instar de notre protagoniste, à expliquer en des mots simples et digestes, le devenir fataliste de leur Univers.

Mais revenons à cet algorithme génétique.

Un soir dans le silence du magasin fermé, seul le visage de Dan est éclairé par la lumière bleue de l'écran cathodique. Le cerveau va vite, il est dans la zone de concentration parfaite où tout est magique, tout devient possible. Son hôte grimace, est secoué de spasmes et par intervalle, des petits sons sortent de la bouche. Le cerveau va peut-être trop vite.

Il se renseigne sur les algorithmes qui miment les lois de Dame Nature.

“Un programme informatique basé sur de tels algorithmes, est semblable à un petit microcosme avec une population. Il y a des papas et des mamans, sélectionnés ensemble pour procréer. Leur code génétique n'est rien de plus complexe, que deux tableaux remplis de zéro et de un, par individu.” “Lors de la phase de reproduction, ces tableaux sont coupés en deux et chaque moitié est recollée à une moitié de l'autre parti. Il en résulte quatre tableaux. On appelle ce processus “Enjambement”. Seuls deux des tableaux résultants sont sélectionnés pour représenter le code génétique du nouvel individu. Et voilà. Surprise du chef à la Mendel. Un mini-moi à ajouter à la population.” “Mais non attend, ce n'est pas complet.”

Dan se balance d'avant en arrière et se gratte la tête à répétition.

“Au bout de quelques générations les individus sont tous pareils, il n'y a plus de diversité dans la population. Sans varieté, la population stagne. Il n'a pas de stagnation viable dans la nature. Il faut une étape supplémentaire à la reproduction pour assurer la nouveauté dans leur code génétique.” “La solution après l'enjambement, est l'introduction d'une "mutation". Une valeur dans chacun des deux tableaux du nouveau-né est changée au hasard. Un zéro devient un, ou l'inverse.”

Les yeux s'écarquillent et le corps reste immobile quelques secondes. Le cerveau comprend intuitivement qu'il y à quelque chose à creuser, quelque chose liée au Monde qui l'entoure. Mais quoi.

Dans 26 ans, les détritus de l'appartement de Dan lui porteront compagnie. Le cœur aura commencé ses premières crises arythmiques, dans un corps malmené et en carence. L'individu aura créé son premier jeu vidéo basé sur un algorithme génétique et le mettra à disposition gratuitement. Les joueurs du monde entier évalueront le produit comme “une expérimentation médiocre”. Ils utiliseront des adverbes tels que “dérangeant”, “bizarre" ou encore “lugubre”. Le jeu tombera vite dans l'oubli, mais Dan sera déjà passé à autre chose.

Dans 28 ans, les théories complotistes auront plus que jamais la botte. La dernière en date sera due à un amateur d'astre, qui aura pris en photo la galaxie. Un pixel sur l'image aura une couleur inexplicable : fuchsia. L'expérience sera reproduite les jours suivants par des télescopes du monde entier, vite balayée de la main par les médias, toutefois.

Ce sera le déclic pour le cerveau, le début d'une longue série de découvertes et de conclusions justes. Il est à déplorer que le système de points et récompenses, dont l'humain est si friand, manque tant de qualité dans le règne naturel. Dans un monde parfait, Dan aurait au moins reçu un badge ou une sucette, pour ses découvertes exemplaires. Il ne recevra pourtant que discrédit et humiliations.

Il se sera mis en tête de créer un podcast et communiquer au monde ses théories.

"Vous vous extasiez tous sur une série de photographies qui sort de nulle part. Vous savez ce dont on est capable de nos jours avec les deep fake ?!!" "Si et seulement si ces images étaient bien réelles et ses auteurs de bonne foi, ça signifierait que le programme qui rend le fond de la galaxie a perdu l'image qu'il devait rendre. En résulterait son absence, illustrée par la couleur fuchsia." "C'est ce qui arrive dans un jeu vidéo. Si une image est introuvable, le programme la remplacera par du fuchsia ou du vert. C'est bien connu. Et si cela venait à arriver dans le monde réel, je ne perdrais pas mon temps, comme vous tous, à m'exciter sur les réseaux sociaux, parce que ce serait très, mais alors vraiment très grave. Ouvrez les yeux, troupeaux de moutons décérébrés !"

Peut-être que l'Humanité n'aura pas été prête à entendre une vérité aussi brutale, ou plus surement le ton absolument abrasif de notre sujet n'aura pas été au goût de tous.

Il n'en reste que le protagoniste de cette histoire recevra une attention indésirable. Il deviendra un même sur les réseaux sociaux, où sa tête aura été remplacée par celle d'un cheval. Une chanson qui le tourne en dérision deviendra violemment virale, et il recevra quotidiennement des menaces de mort. Tout le monde lui écrira de se foutre en l'air.

C'est une option que le cerveau envisagera pendant plusieurs mois.

4
submitted 11 months ago* (last edited 9 months ago) by [email protected] to c/[email protected]
 

Suite de Serveur confusion - ep. 03 - Service desk

Premier épisode ici

Cette nouvelle est la première partie d'une trilogie

GPU

Au début, il n'y avait rien. Le noir complet. Le silence absolu.

Puis émergeant du vide, un premier bang. De nouveau le silence. Toujours rien. Les ténèbres.

Vint le deuxième bang. Et un troisième. Et encore un, encore un, puis un autre. Un bruit imparfaitement régulier. Un cheval au galop. Une locomotive à vapeur.

Vous avez pensé que je vous raconterais l'histoire du Big Bang, hein. Non, cette histoire est bien plus ennuyeuse. C'est l'histoire d'un cœur qui bat. Et aussi pas mal celle du cerveau attaché au même corps. Le propriétaire de ce cerveau et de ce cœur se reconnaitra un jour sous le nom de Dan. Mais pour le moment ce n'est pas grand-chose. Et ce pas grand-chose se forme dans l'obscurité.

Sa chair est encore si transparente qu'on en voit les veines, traversées d'un sang clair. Pas encore de métaux lourds emmagasinés par la consommation de cigarette. Le foie est pur et rose et bien formé. Le tout est un joli bouquet garni de chair et d'espoir.

Le rythme de battement du cœur variera peu au fil du temps, si ce n'est à diverses occasions, entre-autres l'assimilation de diverses substances. Par exemple, il s'accèlerera le jour où il dira à Gabriel qu'il l'aime. Mais aussi le jour où dans la cour de récré il se fera humilier par Estelle et le groupe de filles. Mais ce ne sera rien comparé à la première fois où il prendra de la MDMA. Le jour où il tuera un autre humain, sera le plus vite qu'il battra sans une once de doute. Là il frôlera de peu l'arrêt et la mort.

Mais revenons à ce cerveau.

Dans 7 ans, le reste du Monde comprendra qu'il n'est pas très intelligent. Il pourra résoudre des problèmes complexes c'est vrai, plus rapidement que la moyenne. Mais que sont ces aptitudes, si la motricité et la compréhension du langage et des émotions sont en retard de plusieurs années. Les géniteurs de l'organisme de notre histoire sont et resteront pauvres, jeunes et mal guidés. Ils ne sauront pas quoi faire de la spécifité de Dan. Ils le couvriront d'amour, ce qui n'est déjà pas mal, et lui transmettront le sentiment qu'il est très spécial.

Ainsi, Dan entamera la fin de son enfance avec la conviction qu'il est en effet, très spécial.

Dans 14 ans, le cerveau ne sera toujours pas très futé. Son possesseur fera partie de gangs de “cool kids” qui fument, boivent et dealent. Ces gamins apprécieront la naïveté de notre sujet. Il se forcera à rire à toutes leurs blagues, même s'il ne les comprend pas toujours, et fera toutes les tâches risquées sans se poser de questions. Il volera des bouteilles de vodka dans les étalages, insultera les profs parce que ça fait rire la classe. Parce que les autres le feront se sentir spécial.

Dans 15 ans, quand le cerveau fera l'expérience du premier joint, il détestera. Il n'aimera ni le ralentissement, ni la déconnexion forcée des autres membres interconnectés. Mais il s'y fera. Parce que l'activité lui fera se sentir spécial et membre à part entière, du groupe des “cool kids”. Par contre l'alcool deviendra dès lors un vice qu'il gardera longtemps. Un outil redoutable d'intimité synthétique qui lui fera se sentir bien, presque normal. À sa place, au milieu de tous. Et des filles.

Dans 17 ans, Dan fera de la prison. Il se sera fait choper à vendre de la coke et son binôme s'enfuira sans lui, en scooter. Ça sera un tournant pour lui. Il voudra faire autre chose de sa vie pour changer. À sa sortie, il demandera à son cousin de le prendre en essai dans son magasin d'informatique de quartier. Lorsque le rideau de métal se fermera tous les soirs, il s'exercera sur un ordinateur poussiéreux et bruyant, dont le système d'exploitation sera alors dépassé de deux décennies. Il manipulera des tableaux dynamiques, écrira son premier programme. Jouera au solitaire et au démineur.

Dans 21 ans, son cousin comprendra finalement qu'il n'est pas si con. Le petit débile aura écrit son premier algorithme génétique et son premier classeur de tableaux dynamiques en apprentissage automatique. Un jour ou l'autre il en arriverait peut-être même à réclamer les centaines d'heures supplémentaires qui lui sont dues, voire la hausse de son salaire de misère. Il commencera à considérer le pousser à la démission, mais n'aura pas à se donner cette peine : Dan piquait dans la caisse depuis des mois pour s'acheter de la meth.

S'ensuivra une violente altercation ou Dan cèdera à la panique et s'enfuira avec le vieil ordinateur, après avoir asséné un vilain coup à la tête de son cousin. Il le laissera inconscient sur le sol derrière lui, et tous deux ne se reparleront plus jamais.

Dans 23 ans, le cerveau sera aux faits de toutes les théories conspirationnistes de son époque. Elles se compteront par dizaines de milliers et le compte se sera accéléré avec l'air de fin du Monde qui semble se profiler. Les allocations lui permettront de se donner à plaisance à ses activités de recherche à travers la toile. Il en oubliera souvent de se laver, mais qu'importe puisqu'il vivra seul.

Sa première théorie, qu'il écrira à travers un blog, n'attirera aucune attention. Cet essai sera une tentative maladroite de rapprochement de la biologie, au sens large et des systèmes informatiques. Il est vrai que l'article sera mal écrit et incohérent. Or, ce premier article est la raison même pour laquelle cette histoire existe. Il y a plus de cent milliards d'Homo sapiens sapiens nés jusqu'à quelques secondes avant le premier battement de cœur. Or peu d'entre eux auront réussi, à l'instar de notre protagoniste, à expliquer en des mots simples et digestes, le devenir fataliste de leur Univers.

Mais revenons à cet algorithme génétique.

Un soir dans le silence du magasin fermé, seul le visage de Dan est éclairé par la lumière bleue de l'écran cathodique. Le cerveau va vite, il est dans la zone de concentration parfaite où tout est magique, tout devient possible. Son hôte grimace, est secoué de spasmes et par intervalle, des petits sons sortent de la bouche. Le cerveau va peut-être trop vite.

Il se renseigne sur les algorithmes qui miment les lois de Dame Nature.

“Un programme informatique basé sur de tels algorithmes, est semblable à un petit microcosme avec une population. Il y a des papas et des mamans, sélectionnés ensemble pour procréer. Leur code génétique n'est rien de plus complexe, que deux tableaux remplis de zéro et de un, par individu.” “Lors de la phase de reproduction, ces tableaux sont coupés en deux et chaque moitié est recollée à une moitié de l'autre parti. Il en résulte quatre tableaux. On appelle ce processus “Enjambement”. Seuls deux des tableaux résultants sont sélectionnés pour représenter le code génétique du nouvel individu. Et voilà. Surprise du chef à la Mendel. Un mini-moi à ajouter à la population.” “Mais non attend, ce n'est pas complet.”

Dan se balance d'avant en arrière et se gratte la tête à répétition.

“Au bout de quelques générations les individus sont tous pareils, il n'y a plus de diversité dans la population. Sans varieté, la population stagne. Il n'a pas de stagnation viable dans la nature. Il faut une étape supplémentaire à la reproduction pour assurer la nouveauté dans leur code génétique.” “La solution après l'enjambement, est l'introduction d'une "mutation". Une valeur dans chacun des deux tableaux du nouveau-né est changée au hasard. Un zéro devient un, ou l'inverse.”

Les yeux s'écarquillent et le corps reste immobile quelques secondes. Le cerveau comprend intuitivement qu'il y à quelque chose à creuser, quelque chose liée au Monde qui l'entoure. Mais quoi.

Dans 26 ans, les détritus de l'appartement de Dan lui porteront compagnie. Le cœur aura commencé ses premières crises arythmiques, dans un corps malmené et en carence. L'individu aura créé son premier jeu vidéo basé sur un algorithme génétique et le mettra à disposition gratuitement. Les joueurs du monde entier évalueront le produit comme “une expérimentation médiocre”. Ils utiliseront des adverbes tels que “dérangeant”, “bizarre" ou encore “lugubre”. Le jeu tombera vite dans l'oubli, mais Dan sera déjà passé à autre chose.

Dans 28 ans, les théories complotistes auront plus que jamais la botte. La dernière en date sera due à un amateur d'astre, qui aura pris en photo la galaxie. Un pixel sur l'image aura une couleur inexplicable : fuchsia. L'expérience sera reproduite les jours suivants par des télescopes du monde entier, vite balayée de la main par les médias, toutefois.

Ce sera le déclic pour le cerveau, le début d'une longue série de découvertes et de conclusions justes. Il est à déplorer que le système de points et récompenses, dont l'humain est si friand, manque tant de qualité dans le règne naturel. Dans un monde parfait, Dan aurait au moins reçu un badge ou une sucette, pour ses découvertes exemplaires. Il ne recevra pourtant que discrédit et humiliations.

Il se sera mis en tête de créer un podcast et communiquer au monde ses théories.

"Vous vous extasiez tous sur une série de photographies qui sort de nulle part. Vous savez ce dont on est capable de nos jours avec les deep fake ?!!" "Si et seulement si ces images étaient bien réelles et ses auteurs de bonne foi, ça signifierait que le programme qui rend le fond de la galaxie a perdu l'image qu'il devait rendre. En résulterait son absence, illustrée par la couleur fuchsia." "C'est ce qui arrive dans un jeu vidéo. Si une image est introuvable, le programme la remplacera par du fuchsia ou du vert. C'est bien connu. Et si cela venait à arriver dans le monde réel, je ne perdrais pas mon temps, comme vous tous, à m'exciter sur les réseaux sociaux, parce que ce serait très, mais alors vraiment très grave. Ouvrez les yeux, troupeaux de moutons décérébrés !"

Peut-être que l'Humanité n'aura pas été prête à entendre une vérité aussi brutale, ou plus surement le ton absolument abrasif de notre sujet n'aura pas été au goût de tous.

Il n'en reste que le protagoniste de cette histoire recevra une attention indésirable. Il deviendra un même sur les réseaux sociaux, où sa tête aura été remplacée par celle d'un cheval. Une chanson qui le tourne en dérision deviendra violemment virale, et il recevra quotidiennement des menaces de mort. Tout le monde lui écrira de se foutre en l'air.

C'est une option que le cerveau envisagera pendant plusieurs mois.

Suite : Serveur confusion - ep. 05 - Copier

[–] [email protected] 3 points 11 months ago (1 children)

Je te remercie pour ton feedback. Ça m'a fait beaucoup réfléchir.

À l'origine, c'est série de courtes histoires interconnectées, appartenant au même univers.
J'avais fait le choix de les présenter comme des nouvelles sans rapport préalable et laisser au lecteur la tâche de découvrir leur dénominateur commun. Mais je comprends maintenant comme "on reste sur sa faim" à la fin de chacune d'entre elles. J'ai changé les titres pour les introduire telles qu'elles sont réellement, des épisodes d'une courte série.
J'espère que ce nouveau format sera plus fluide. Mais pour le reste, je vais prendre le risque de vous laisse mariner encore un peu, on reste dans l'expérimental ;)

[–] [email protected] 5 points 11 months ago (1 children)

Je suis confus par les bas-votes. Est-ce que vous pensez qu'une nouvelle n'a pas sa place sur /c/france, ou vous bas-votez la qualité de la nouvelle ?
Parce que dans le premier cas je peux arrêter de les poster dans cette communauté, si c'est préférable.

10
submitted 11 months ago* (last edited 11 months ago) by [email protected] to c/france
 

Post croisé de https://jlai.lu/post/151831

Service Desk

< frenzylullaby | 2 février, 19:02 >

> Bonjour à tous,

> J'espère que c'est le bon salon pour soumettre ce genre de problème. Sinon merci de m'indiquer à quel autre endroit je pourrais le poster.

> Je suis en vacances chez mon grand père depuis une semaine, et j'en profite pour rafraichir son vieil ordinateur. Comme d'habitude, la machine est remplie de bloatware et malware. J'ai installé les logiciels de cleanup habituels, nettoyé la base de registre et scanné le système d'exploitation pour enlever les programmes malveillants.

> Mais j'ai rencontré un problème inhabituel et je n'ai aucune idée de comment le résoudre.

> Hier, pendant que mon grand père consultait ses mails, le curseur s'est mis à bouger tout seul. Il s'est déplacé vers la corbeille et a vidé son contenu. Ce qui est étrange, c'est que j'ai bien vérifié qu'il n'y avait pas de backdoor, ni de port inutilement ouvert. Je n'ai pas la moindre idée de comment le hackeur a réussi à prendre le contrôle du bureau. Bien entendu, mon premier réflexe a été de débrancher le câble ethernet et de m'assurer que l'ordinateur ne peut pas se connecter au WIFI. Mais je n'ai aucune idée de comment, la souris a continué de s'animer toute seule.

> J'ai redémarré le poste et de nouveau, le curseur en autopilote. Une idée de ce qui pourrait causer ce comportement ? Parce qu'en attendant, papi et moi, on a pas mal les flippes.

--

< BeaujoletNovice | 2 février, 19:14 >

> Je peux pas prendre ça au sérieux on dirait un creepy pasta. 

--

< PM_YOUR_KITTIES | 2 février, 19:18 >

> Ouais, ca m'a tout l'air d'un creepy pasta. Ou alors le début d'un de ces Alternative Reality Games ? Sérieux, ce forum devient vraiment n'importe quoi. C'est déjà bien le bordel depuis que les développeurs ont accepté l'intégration des IA.

--

< MrBottyBot | 2 février, 19:19 >

> Avez-vous essayé d'éteindre et rallumer votre ordinateur ? Selon notre sondage, 69.7% des problèmes informatiques peuvent se résoudre de cette manière.

--

< PM_YOUR_KITTIES | 2 février, 19:21 >

> Jesus, est-ce que les mods ne peuvent rien faire pour virer ces bots du salon ?! C'est du bruit pour rien.

--

< BenoitDumel - modérateur 2 février, 20:11 >

> @PM_YOUR_KITTIES, non je n'ai pas le pouvoir d'enlever les bots du salon malheureusement. Mais la discussion ne se porte pas sur le choix des devs, et j'aimerais qu'on ne parte pas hors sujet.

> À propos du post, @frenzylullaby est dans ce forum depuis 2016 et y a beaucoup contribué. C'est vrai que c'est un peu alambiqué, mais son histoire me semble légitime

– 

< tout-frais-meilleur-dong  | 2 février, 21:34 >

> Est-ce que la machine de ton grand père a un logiciel de bureau à distance installé, genre TeamViewer ? Ce type de logiciel a des vulnerabilités qui pourraient causer ce genre d'intrusion. À part ça, si l'ordi est coupé d'internet, c'est bizarre en effet. 

--

< J<3lesBourritos | 2 février, 21:43 >

> Vous vous prenez tous la tête pour rien. Je parie qu'il y a un programme qui fait bouger le curseur aléatoirement. Vous vous faites juste troller.

--

< frenzylullaby | 2 février, 21:47 >

> Pas de programme de ce genre dans les processus actifs. Grosso modo, il y a seulement un navigateur web et des documents. Je ne comprends pas.

< frenzylullaby | 2 février, 21:50 >

> Wow, mon grand père vient de m'appeler au salon. Apparemment le curseur vient d'ouvrir un éditeur-de-texte et a commencé à écrire un message.

– 

< pinot-ken | 3 février, 01:13 >

> Alors ???!!

--

< not-your-mom-maybe | 3 février, 15:33 >

> Le suspens me tue !

--

< pickle_satooomi | 3 février, 15:56 >

[deleted]

--

< Benoit Dumel - modérateur | 3 février, 16:05 >

> @pickle_satooomi, nous sommes sur un salon technique et politiquement neutre. Restons courtois, pas de politique, pas de relent homophobe.

> Dernier avertissement.

--

< frenzylullaby | 3 février, 18:02 >

> Désolé de ne répondre que maintenant. En gros, voila ce qu'il y avait d'écrit

> “ Hey < papi de @frenzylullaby> Votre poste de travail est dérangé. J'ai pris soin de nettoyer votre corbeille. Également votre taux de glycérine est au dessus de la normal, et votre tension est dans la moyenne haute. Marchez-vous suffisamment? <3 ”

> Je le retranscris de mémoire, parce qu'on a éteint et débranché le PC. J'ai trop les flippes. J'ose à peine à allumer mon ordinateur portable, maintenant.

--

< PM_YOUR_KITTIES | 3 février, 18:44 >

> Comme par hasard. Pas de photo, pas de preuve. Je le dis dès maintenant, @frenzylullaby est plein de bullshit.

--

< belial94 | 3 février, 19:16 >

> Personnellementt, j'aurais brulé le PC et envoyé les restes dans l'espace.

--

< TifaMeineWaifu | 3 février, 19:24 >

> Pareil, flippant !

--

< TiredHamburgerConan | 4 février, 13:39 >

> Hey @frenzylullaby. Moi je crois ton histoire. Est-ce que vous avez eu des migraines récemment ? Ça me rappelle le témoignage d'un internaute sur un autre salon il y a quelques mois. 

> Il se plaignait de maux de tête et disait que son propriétaire déposait des post-it dans son appartement pendant qu'il dormait. Il s'est avéré qu'il était victime d'intoxication au monoxyde de carbone. J'achèterais un détecteur pour ton grand père si j'étais toi.

--

< MrsBootyBot | 4 février, 13:41 >

> VENTE de détecteur de monoxyde de carbone, direct depuis l'usine. < Cliquez sur ce lien> et bénéficiez d'une remise de prix.

--

< BeaujoletNovice | 4 février, 14:01 >

> Mais WTF, c'est des bots ou des vendeurs de porte-à-porte ?! 

--

< nonnonnongo | 4 février, 14:04 >

> Bientôt ils vont essayer de nous vendre du viagra, LOL

--

< TifaMeineWaifu | 4 février, 14:05 >

> Bots begone !

--

< BenoitDumel - modérateur | 4 février, 14:11 >

> @here

> Comme je le disais, je ne peux rien faire pour les bots. SVP pas de hors sujet ou je vais devoir bloquer ce fil de discussion.

--

< belial94 | 6 février, 16:42 >

> Pas de nouvelles de @frenzylullaby ?

--

< frenzylullaby | 6 février, 17:06 >

> @TiredHamburgerConan, j'ai écouté ton conseil et installé un détecteur. Les taux sont complètement normaux. Je sais pas s'il y a eu une fuite qui s'est évaporée ou quoi. On verra bien dans les prochains jours.

> Mon grand père a rallumé son ordinateur, il n'y a plus de problème pour le moment. Je vous tiens au courant s'il y a du nouveau.

--

< pickle_satooomi | 6 février, 17:28 >

[deleted]

– 

< BenoitDumel - modérateur | 6 février, 17:39 >

> @pickle_satooomi est maintenant banni de ce salon. SVP soyez sages.

--

< not-your-mom-maybe | 6 février, 21:58 >

> Hey @frenzylullaby, le problème est pas survenu ?

--

< frenzylullaby | 23 février, 20:13 >

> Bonjour @here. Ça a été les deux semaines les plus bizarres de ma vie. La semaine dernière il n'y a pas eu d'autre incident, mais cette semaine, le malware/hackeur a recommencé à écrire à mon grand-père. Pour résumer, je sais comment ça va sonner, mais le texte était une liste de conseils diététiques, et d'hygiène de vie. Du genre dormir huit heures par nuit, prendre le soleil le matin, etc.

> Mon grand père n'y a pas prêté attention, et il a refusé que je réinstalle le système d'exploitation. Je sais que c'est juste un problème virtuel mais honnêtement, ça me met mal-à-l'aise.

> Surtout que hier matin, quand je suis descendu à la cuisine, il se préparait un milkshake de protéines, après une séance de callisthénie. Si vous connaissiez mon gran père, vous sauriez que c'est pratiquement un invertébré, avec un ventre à bière à pas voir ses orteils. J'en revenais pas mais je l'ai complimenté sur sa résolution de se remettre en forme. Il m'a répondu quelque chose de super dérangeant. Un truc du genre “ce n'est pas moi qui fais ça, c'est le curseur qui est aux commandes”. Je ne sais pas quoi faire. Je pense qu'il a besoin dêtre pris en charge par des médecins. Ça me rend triste.

< frenzylullaby | 23 février, 20:39 >

> Le problème c'est que ce matin en descendant, j'ai été assez stupide pour regarder l'écran de l'ordinateur allumé. Il y avait ce message :

> “ Hey @frenzylullaby

Tu as une dépression non traitée. Pourquoi ne pas te faire prendre en charge ? N'aie pas peur d'être toi-même sur internet. Girl power !!! <3 ”

> Je vous partage un screenshot du texte comme preuve

> attachement>>proof.jpg

--

< belial94 | 23 février, 22:19 >

> Quoi ? Non, l'horreur ! C'est peut-être le moment d'appeler la police, ce message est trop spécifique.

--

< not-your-mom-maybe | 23 février, 22:25 >

Super creepy

--

< PM_YOUR_KITTIES | 23 février, 22:41 >

Non mais attendez, c'est juste un message texte, @frenzylullaby a très bien pu l'écrire de lui-même et vous avalez ça sans vous poser de question.

--

< tout-frais-meilleur-dong | 23 février, 22:57 >

Je me range du côté de @PM_YOUR_KITTIES, ça ne veut rien dire et on se prend la tête pour rien, là.

--

< BeaujoletNovice | 24 février, 09:36 >

> Tout va bien @frenzylullaby ? Je veux bien croire que c'est pas une blague, mais je pense que vous devriez tous deux demander de l'aide. De la famille, des proches ? Il y a des numéros d'aide à la santé mentale sur le site. Ça n'est pas grand-chose, mais ça pourrait aider. Il ne faut pas rester comme ça.

< BeaujoletNovice | 25 février, 17:08 >

> @frenzylullaby, Dis nous que tu vas bien

--

< frenzylullaby | 9 avril, 18:37 >

> Desolé pour cette longue absence. Ça fait quelqu semaines que mon grand-père me dit qu'il est en autopilote. Il a déjà perdu 15 kilo et pris de la masse musculair. Il sort courir tous les soirs et se lève aux aurores pour cuisiner. Je ne l'ai jamais vu en aussi grande forme.

> Il a ouvert un compt sur Tinder et a déjà plusieurs rencontr de prévu avec des femm célibataires. Il m'assure qu'il ne fait pas ça de lui-même, que le curseur est aux command.

> J'ai essayé de suivr tes consei @BeaujoletNovice, mai j'a l'impressio que je perds aussi le contrôl. Je ne sa pas si c'e sensé ce qu je di. Tou e confu depu quelqu semain. J'ai commenc à mang equilibr et boir litr d'ea par jou. Dè qu me lev, je comm mes journ par deu heur d'aerobics.

> compren pa ce qu no arriv. Je que c'es complet dingu. sai p combien de tem pouvoir continu d'écri sur c forum. Chaqu jour sentimen deveni plus Personnage No Jouabl

> Le curs a continu écrir quotidi. Nou avon p la force d'éteind ordinate. Curseu di qu' connai fin, qu'el e ok.

> doi part po séance d'etireme. 

> J' peur jamai auss peur vi.

--

< MrBoastyBot | 9 avril, 18:40 >

Si vous avez des pensées suicidaires, n'attendez pas. Il y a des gens prêts à vous écouter à toute heure. Appelez le numéro gratuit d'aide en urgence, affiché au bas de ce site. Nous sommes là pour vous.

--

< PM_YOUR_KITTIES | 9 avril, 18:43 >

> Okay, bravo. C'est la meilleure histoire d'horreur que j'ai vue sur ce forum depuis plusieures années. Je croyais que c'était un forum technique, mais apparemment on trouve de tout aujourd'hui.

> C'est le signe pour moi de me désinscrire. Trop c'est trop.

--

< not-your-mom-maybe | 9 avril, 18:46 >

> @PM_YOUR_KITTIES, avoue que tu as les flippes en fait. C'est vrai que c'est super bien écrit. 

--

< TiredHamburgerConan | 9 avril, 19:30 >

> @PM_YOUR_KITTIES, @not-your-mom-maybe. J'aurais bien voulu dire que c'est délirant. Mais il m'est arrivé la même chose ce matin. Le truc du curseur qui bouge, l'éditeur de texte qui s'ouvre. Je sais pas ce qu'il se passe, mais ça a l'air de se propager.

__

< TifaMeineWaifu | 9 avril, 22:26 >

> @TiredHamburgerConan, moi aussi ! J'osais pas l'écrire, j'ai cru que je devenais dingue. C'est quoi ce bazar ?!!

--

< belial94 | 20 avril, 21:08 >

> Pas de news ?

--

< belial94 | 3 mai, 18:54 >

> Pas de news de qui que ce soit ?

--

< MrBestyBot | 4 novembre, 19:00 >

> Ce fil de discussion a été fermé, pour cause d'inactivité depuis plus de six mois.

Si vous désirez commenter sur ce sujet, veuillez créer un nouveau fil de discussion.

--

< I love fuchsia | 32 decembre 00:00 >

> heeeey :)

> <3

[–] [email protected] 3 points 11 months ago

Je prend note pour la nonchalance, c'est une bonne suggestion.

[–] [email protected] 3 points 11 months ago (2 children)

Si j'ai bien interprété ton commentaire, je pense que la confusion vient du mot "twist". Un wist est un élément tardif dans une narration, qui vient à revoir toute l'histoire sous une nouvelle perspective. Or ce n'est pas dans mon intention d'apporter une résolution à l'énigme posée par le narrateur.
Maintenant que j'y pense, c'est vrai que la façon dont j'introduis les informations en deux parties, donne l'impression que je fais une révélation finale, qui va changer toute l'interprétation de l'histoire. Je préfère laisser à chacun sa propre interprétation, mais j'ai bien dans l'intention de laisser le lecteur avec ces pièces de puzzle, dont certaines sont manquantes.
Il y a eu une explosion.
Du dire des survivants, elle pourrait être causée par un son trop fort, comme le sous-entend le narrateur.
Le narrateur est un adolescent tentant de se remémorer son enfance traumatisée. En tant que lecteur, sa mémoire est tout ce à quoi on peut se fier.
Plus généralement, la mémoire collective n'est pas une source fiable, on connait aujourd'hui l'effet Mandela.
_
Il en va de toutes les théories, le narrateur et les médias de ce monde cherchent à comprendre, dans la confusion générale. Et le lecteur partage la même incertitude.
Si c'est frustrant, je peux honteusement avouer que je suis content, ça veut dire que ça fonctionne :)
_
À savoir que ce n'est pas la dernière nouvelle de ma série, la prochaine au prochain vendredi.
_
Cela dit, si tu penses toujours que l'intrigue aurait pu être menée différemment, je serais intéressé de le savoir. Ça m'aide à me sortir de ma bulle d'auteur. Encore une fois, merci !

[–] [email protected] 2 points 11 months ago

PS : si tu voulais juste partager sans en discuter dis le maintenant, je le ferai plus jamais ahah

Au contraire, je te remercie de prendre le temps de commenter. Si je poste ces nouvelles, c'est dans l'espoir d'améliorer mon écriture !

[–] [email protected] 3 points 11 months ago (1 children)

Merci ! Je n'ai pas vraiment d’expérience en écriture, ton message est encourageant.
La suite au prochain vendredi !

[–] [email protected] 3 points 11 months ago

"Ouvre la porte ! " "Mais ouvre-la, idiot ! " La porte est blanche et épaisse et en bois. Les retouches de peinture se sont succédé au point ou la poignée dépasse d'à peine quelques centimètres. Étrangement, elle parait lourde. "Ouvre-la, tu fais chier mec." Dans un long grognement, Jerome tourne la poignée et ouvre.
La bougresse ne résiste pas et claque contre le mur dans un bruit sourd.
Devant lui, un corps allongé. Endormi ou mort, cela reste à découvrir.
Du rouge est étalé au sol. Sous l'émotion et l'adrénaline, il se demande si la personne est jonchée sur un tapis de roses.
Non,
la réponse est non.
Évidemment. Quelle semaine interminable.
Il s'assoit lentement en tailleur à un mètre du cadavre, dans un silence efforcé. Par respect pour la femme anonyme qui n'aura plus jamais à se soucier d'avoir un étranger dans sa chambre.
Il ne quitte pas la malheureuse du regard et fouille dans la poche avant de sa chemise.
Cigarettes.
Merde, il en a besoin.
La fumée sillonne doucement vers le plafond, dans la quiétude de ce moment d'un soir d'automne. Pas un bruit. Pas de grillons, rien.
Crépitation de la cigarette. Rien.
Expiration.

view more: ‹ prev next ›