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Une piste de réponse dans cette tribune : https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/03/les-cours-criminelles-departementales-contribuent-a-la-perpetuer-l-invisibilisation-des-crimes-de-viol_6180366_3232.html
Depuis le 1er janvier 2023, les viols sont symboliquement devenus des crimes de « seconde classe », réduisant à néant le long combat de Gisèle Halimi pour qu’ils soient jugés comme des crimes à part entière, mais aussi celui de toutes celles et ceux qui luttent contre les violences sexistes et sexuelles.
En effet, face au manque de moyens alloués à la justice et au nombre d’affaires de viol devant être jugées, la seule réponse du gouvernement a été l’instauration des cours criminelles départementales, expérimentées dans plusieurs départements depuis 2019. Or ces cours ne permettent pas une prise en compte adaptée, par la justice, du problème public des violences sexistes et sexuelles.
Pour rappel, selon l’Observatoire national des violences faites aux femmes, on compte en France 94 000 femmes majeures se déclarant victimes de viol ou de tentative de viol par an, soit une toutes les six minutes. Malgré les nombreuses voix qui se sont élevées contre cette réforme et les carences constatées dans le rapport rendu par le comité d’évaluation en octobre 2022, les cours criminelles départementales sont à présent les seules juridictions chargées de juger toute personne majeure accusée d’un crime puni jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle, hors récidive.
En pratique, les affaires jugées par ces cours sont, dans près de 90 % des cas, des affaires de viol. Présentées par le gouvernement comme une alternative permettant d’éviter la correctionnalisation des viols – pratique consistant à disqualifier le viol pour le juger comme un délit d’agression sexuelle devant un tribunal correctionnel sans jurés, dans une optique de gain de temps –, les cours criminelles départementales, en écartant le jury populaire, s’apparentent pourtant à une forme de correctionnalisation. Cette réforme est un non-sens démocratique
Le viol n’est en effet plus jugé par une cour d’assises comme les autres crimes. Poursuivant une logique gestionnaire, le gouvernement a souhaité faire des économies en supprimant le jury populaire, les cours criminelles étant exclusivement composées de magistrates et de magistrats professionnels. Ces prétendues réductions de coût se font au détriment des citoyennes et des citoyens, de la démocratie et du traitement judiciaire des crimes de viol.
Nous, citoyennes et citoyens engagés, femmes et hommes appartenant à des associations et collectifs féministes, à des organisations de la société civile, aux professions du droit et du monde judiciaire, considérons que cette réforme est un non-sens démocratique ainsi qu’un recul des droits des femmes et des minorités de genre et nous dénonçons l’instauration de ces cours criminelles.
Parce que la « densité émotionnelle des récits redonne un contenu aux mots du droit », Denis Salas a choisi, pour raconter le déni séculaire du viol, d’adopter une approche « narrative ». De Maupassant à Nancy Huston en passant par Montherlant ou J. M. Coetzee, le magistrat et essayiste puise dans la littérature, mais aussi dans les témoignages et dans les comptes rendus judiciaires, des récits qui permettent de mesurer la « brutalité immémoriale » des hommes envers les femmes. Cinq ans après #metoo, il décrypte avec beaucoup de justesse et de subtilité la manière dont la révolte contre le viol a engendré une nouvelle sensibilité collective « centrée sur la femme, son histoire, son corps et ses droits ».
Denis Salas n’en oublie pas pour autant qu’il est, depuis des décennies, un fin analyste de la justice pénale française – il préside aux destinées des Cahiers de la justice et de l’Association française pour l’histoire de la justice. Son approche narrative se double donc d’une analyse approfondie et documentée des silences, des impasses mais aussi des vertus des instances judiciaires. Le monde du droit, montre-t-il dans cet ouvrage passionnant, est capable de « faire progresser la cause des sujets sans droits » : quand les récits des victimes « déplacent les normes du langage, contestent les intérêts dominants, bousculent les hiérarchies en place », la justice devient un « point d’appui solide pour reprendre pied dans le monde ».
D’un point de vue pratique, les objectifs des cours criminelles départementales n’ont pas été atteints. Selon le dernier rapport d’évaluation, ni la correctionnalisation, ni le temps d’audiencement, ni la durée des audiences n’ont été significativement réduits. En tout état de cause, l’objectif de réduction du temps d’audience poursuivi par la réforme est un retour en arrière dans l’attention portée aux femmes victimes et à leur traumatisme. Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Justice : la généralisation des cours criminelles départementales contestée
En outre, le taux d’appel des décisions des cours criminelles témoigne de l’insatisfaction des justiciables sur la manière dont les audiences s’y déroulent : 23 % pour les affaires de viol jugées par les cours criminelles départementales, contre 17 % devant les cours d’assises. D’un point de vue social et psychologique, elles empêchent les victimes de viol de faire entendre leur voix largement. Reléguer le crime de viol au second plan
L’espace de parole donné aux victimes est d’autant plus important qu’il s’agit d’un crime caractérisé par la loi du silence qui empêche encore trop de victimes de demander justice : en 2016, seulement 12 % des victimes d’agressions sexuelles portaient plainte, selon les chiffres relayés par le gouvernement. Le Monde Ateliers Cours en ligne, cours du soir, ateliers : développez vos compétences Découvrir
D’un point de vue démocratique, ces cours criminelles soustraient le crime de viol à la connaissance des jurys citoyens amenés à siéger en cour d’assises. Les citoyennes et citoyens sont désormais mis à l’écart de l’œuvre de justice en matière de violences sexuelles. Cela prive donc une partie de la population d’une sensibilisation à la réalité de ces crimes et de la possibilité de participer à la manière dont ils sont jugés. Cela contribue à la perpétuation de l’invisibilisation des crimes de viol. Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Laurence Vichnievsky : « La création d’une juridiction spéciale contre les violences intrafamiliales est une fausse bonne idée »
D’un point de vue juridique et politique, faire juger les viols par une juridiction criminelle distincte revient à les disqualifier et ne résout pas le problème éminemment éthique et juridique de la correctionnalisation. Faire juger les crimes sexuels par une juridiction compétente pour connaître des crimes dits « les moins graves » minimise le crime de viol dans l’esprit du plus grand nombre. Elle relègue le crime de viol au second plan par rapport aux autres crimes. Préserver le jury populaire et sauver les assises
Alors que le projet de loi de programmation et d’orientation de la justice 2023-2027 est actuellement débattu à l’Assemblée après avoir été voté par le Sénat, nous appelons les députés à voter les amendements à l’article 3 qui visent à supprimer les cours criminelles départementales, préserver le jury populaire et sauver les assises ! Lire aussi : Article réservé à nos abonnés « La généralisation des cours criminelles paraît relever de l’absurde »
Nous demandons aux pouvoirs publics de prendre la mesure de la gravité et de la singularité du crime de viol. Nous demandons une augmentation du budget alloué à la justice et au programme de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes pour lutter efficacement contre les violences sexistes et sexuelles et pour que les procès qui en découlent se déroulent dans le respect des droits des victimes et des principes fondamentaux de notre République.
Nous demandons le recrutement de personnels judiciaires supplémentaires pour le jugement des violences sexistes et sexuelles. Le viol doit faire l’objet de réformes à la mesure de la gravité et de l’ampleur du problème public qu’il représente. Voter pour qu’il ne devienne pas un crime de « seconde classe » est indispensable.